Génie du Mal pour classes maternelles.
Le docteur Mabuse, génie du Mal et création romanesque comparable à l’immortel Fantômas ? Mais quelle blague ! Je n’ai certes pas vu, et ne verrai sans doute jamais (mais si, depuis lors, j’ai vu le premier opus de la série) le premier film consacré à ce grand criminel, Docteur Mabuse le joueur en 1922, par le même Fritz Lang qui a réalisé ce Testament du Docteur Mabuse en 1933, puis, en 1960, Le diabolique Docteur Mabuse, avant de laisser la place à des tâcherons de moindre notoriété, qui ont usé et abusé de la franchise (jusqu’au douteux Jésus Franco avec La vengeance du Docteur Mabuse).
Est-ce qu’il fait peur, ce méchant psychopathe ? Pas tellement, ce qui est ennuyeux pour une incarnation du Mal. Est-ce qu’il pourrait le faire ? Oui, et comment, puisqu’il n’est pas animé, au contraire de beaucoup de monstres, par une sorte de soif inextinguible de l’argent et du pouvoir mais, en son principe, par une sorte de volonté satanique, prométhéenne, de détruire toute civilisation et d’instaurer – carrément ! – le règne du Mal sur terre.
Nihilisme et anarchie, excellentes prémisses, extrêmement mal mises en situation, qui aboutissent à un pauvre petit film mi-policier, mi-fantastique qui aurait pu être tourné par n’importe quel réalisateur, tant les prises de vues sont sages et banales et qui ne donnent à aucun moment l’impression d’être baigné dans l’imaginaire d’un maître de l’angoisse.
Je n’ai pas pour Lang l’adulation ressentie par toute la rédaction des Cahiers du cinéma, mais enfin j’ai beaucoup apprécié, jadis, M le maudit (vu il y a très longtemps, il est vrai), le diptyque Le tigre du Bengale/Le tombeau hindou recèle des splendeurs très impressionnantes, tout comme Les contrebandiers de Moonfleet et même dans Au fil de l’eau, il y a des scènes glaçantes.Rien de tout cela dans ce Mabuse. Lang et quelques thuriféraires ont a posteriori expliqué que le film se voulait un avertissement contre la survenue du nazisme et que la bande du Docteur démoniaque représentait celle des séides d’Hitler. Georges Sadoul a fait litière de cette légende dorée, rappelant opportunément que la femme de Fritz Lang, Théa von Harbou, co-scénariste du film, était, et est demeurée, membre du NSDAP.
Histoire à la limite de l’enfantillage, acteurs sans intérêt, réalisation plate comme une limande. Un 1 de commisération.