Un homme et une femme

Mélodramatique et kilométrique.

Qu’est-ce qui m’a retenu de regarder ça il y a cinquante ans, lorsque c’est sorti sur les écrans, pour ne le découvrir qu’aujourd’hui ? Sans doute l’adulation consensuelle de tout le monde et le désastreux succès de la ritournelle Chabadabada du roublard Francis Lai.

Mais qu’est-ce qui m’aurait plu, si j’avais vu ça à l’époque ?

 Sans doute la qualité des deux interprètes. J’avais déjà repéré Jean-Louis Trintignant pour Et Dieu créa la femme mais surtout pour son rôle du Poète crotté dans Merveilleuse Angélique de Bernard Borderie (et écrivant cela, je me dis qu’il faudra bien que je revisionne et commente cette grisante série romanesque dont les trois premiers épisodes sont de vraies réussites). 0

Et Anouk Aimée, aperçue déjà, du côté mièvre, dans les assez mauvais Amants de Vérone d’André Cayatte, dans le très bon Pot-Bouille de Julien Duvivier et surtout délicieusement belle portant la guêpière de Lola de Jacques Demy. Ce qui est d’ailleurs curieux, c’est que la carrière des deux acteurs s’est croisée presque à ce moment là : après Un homme et une femme, celle d’Anouk Aimée ira plutôt en décroissant, celle de Jean-Louis Trintignant ne cessera de s’enrichir ((avec Z, Ma nuit chez Maud, Le train, Flic story, Vivement dimanche et bien d’autres…).

En tout cas la scène de leur émerveillement mutuel est assez joliment écrite et bien tournée, sur fond de ciel gris-bleu, mer bleue-grise et sable blond. Lelouch est assez délicat en filmant l’enchantement de la découverte…Et puis peut-être aurais-je découvert plus tôt que je ne l’ai fait le merveilleux talent du Brésilien Vinicius de Moraes (auteur de la pièce dont est tiré Orfeu negro), dont Pierre Barouh adapte assez maladroitement une chanson majeure, Saravah ; mais aurais-je alors fait l’effort de rechercher l’interprétation originale ? Va savoir !

Bon, c’est à peu près tout ; comme tous les films de Claude Lelouch, ça se laisse voir, ça n’est pas exaspérant de prétention, ça ne se veut ni Godard, ni Antonioni, mais il y a pourtant beaucoup de moments creux ou des scènes tournées pour le seul plaisir du réalisateur et sans doute celui de ses acteurs : ainsi les interminables séquences en voiture, sur la route, en rallye, ou sur la piste de Montlhéry (on sait que Jean-Louis Trintignant était le neveu de Pétoulet, Maurice Trintignant, double vainqueur du Grand prix de Monaco et était lui-même féru de courses automobiles). La Normandie mouillée et les enfants confiés à des institutions privées dispendieuses touchent là beaucoup moins que les mêmes contrées et situations filmées dans Un singe en hiver.

Il y a aussi des moments d’un ridicule consternant : ainsi la mort de Pierre (Pierre Barouh) le cascadeur mari d’Anne (Anouk Aimée) qui saute sur une mine lors d’un tournage, ainsi le suicide de Valérie Duroc (Valérie Lagrange), ainsi le rêve absurde de Trintignant se voyant en maquereau relevant les compteurs de ces dames. Et la fin du film est bien niaise.

Mais enfin ! Cela a valu des myriades de récompenses à toute l’équipe et un succès éclatant qui a permis à Lelouch de poursuivre son petit bonhomme de chemin…

 

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