Braquage à l’italienne

La mazurka des millions.

Jusqu’à ce que je m’émerveille de voir trois bombes Mini Cooper, bleue, blanche et rouge rouler à toute allure dans les couloirs du métro et des collecteurs d’égout, je pensais que Braquage à l’italienne était une œuvre originale et si j’avais rapproché d’un autre le film de F. Gary Gray c’est bien plutôt à Mission : impossible (davantage encore à la série qu’aux films) que j’aurais songé. Il est vrai que je n’avais plus du tout en tête L’or se barre de Peter Collinson depuis que je l’avais vu en 1969, dont je me rappelais seulement le trio de voitures, fantaisie charmante, virevoltante et narquoise comme savaient en tourner les Britanniques à l’époque.

En fait – et cela est rappelé sur tous les tons par les scénaristes Wayne et Donna Powers dans les suppléments du DVD – Braquage à l’italienne n’est qu’un incertain remake de L’or se barre. il en conserve la structure, la rapidité, l’esprit ; il en conserve nombre des éléments, des péripéties et – si je me souviens bien – l’extrême spécialisation des protagonistes du gigantesque casse qui assure aux habiles larrons un joli butin de 35 millions de dollars. Mais il ne me semble pas que le groupe nourrissait en son sein une brebis galeuse, différence qui permet de riches développements, mais soustrait l’impression de joyeux bordel presque psychédélique dont on se délectait dans le film initial.

Moins spirituel et civilisé, mais sans doute plus efficace, Braquage à l’italienne est un spectacle extrêmement attrayant, mené tambour battant, qui bénéficie de très importants moyens financiers, d’une excellente distribution et d’un scénario très inventif, dont on peut admirer les rebondissements constants, même si l’on n’en est pas tout à fait dupe. C’est quelque chose de très hollywoodien, de très professionnel, de très léché. On peut se demander si l’on ne pourrait pas fouiller un peu davantage les ressorts psychologiques des personnages, mais il est vrai aussi que ce n’est pas tellement ça qu’on demande à ce genre de productions.

De la même manière il ne faut pas chipoter sur l’expertise fabuleuse des membres de la bande : chacun est forcément un as absolu dans sa partie ; c’est là qu’on rejoint le plus les héros de Mission : impossible (avec la notable différence que ceux-ci agissaient pour la défense du Monde libre et non pour s’approprier la grosse galette). Chacun a son rôle très typé et chacun est présenté de façon très amusante avec une remontée dans son enfance ; et la palme, à ce titre revient incontestablement au génie des explosifs, Dur d’oreille (Mos Def) ainsi nommé parce que, charmant garnement, il s’est fait sauter le tympan en même temps que la cuvette des toilettes de son école. Il y a donc lui et aussi le Cerveau, le roi des voleurs, qui a commencé lui aussi très jeune, Charlie Crocker (Mark Wahlberg), le séducteur et conducteur émérite Handsome Rob (Jason Statham) et sans doute surtout Lyle Napster (Seth Green). Et, admirable cerise sur ce beau gâteau, la magicienne de l’ouverture des coffres-forts, Stella Bridger (Charlize Theron), émule et fille de John, Mozart de l’effraction (Donald Sutherland).

On ne va pas conter l’aventure de ces sympathiques canailles vengeresses ; on ne peut que jubiler devant l’habileté des scénaristes à insérer ici et là des grains de sable percutants (image hardie, j’en conviens !) qui relancent à chaque instant l’intérêt, la nervosité du film. J’oublierai vite les péripéties complexes, je n’oublierai pas que j’ai pris du plaisir à les découvrir.

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