Jean Rollin a toujours dit, asséné, proclamé qu’il écrivait ses scénarios en écriture automatique, cette billevesée née avec les spirites cinglés de la fin du 19ème siècle et remise à la mode par ce farceur d’André Breton et son groupe surréaliste tout aussi dingo. Ça consiste à abolir tous les cadres de la raison et de la cohérence. Rollin explique qu’il voit d’abord des images frappantes, des séquences fortes ; il les tourne et les relie ensuite dans une histoire qui n’a naturellement d’autre queue ni tête que de comporter des acteurs dans un décor impressionnant (souvent réussi, d’ailleurs) et de porter, comme toujours sur le sexe et le vampirisme. Ça peut quelquefois fonctionner, à tout le moins amuser, voire séduire, mais ça ne convainc évidemment pas.
À ce titre, La vampire nue fait partie des ratages les plus épouvantables qui se puissent. Titre séduisant, bien sûr, mais histoire en dessous de l’indigence, absence de rythme, bêtise atterrante du propos et médiocrité totale des acteurs, insignifiance physique des actrices montrant (assez parcimonieusement d’ailleurs) des corps dénudés qui, même en 1970, ne parvenaient pas à satisfaire la libido de l’honnête amateur.
De belles trouvailles de décor, toutefois ; j’aimerais savoir ce qu’est le grand château, cette superbe demeure où la conclusion du film s’installe, qu’on pourrait presque croire (à l’intérieur) la sublime saline royale d’Arc-et-Senans de Claude-Nicolas Ledoux ou bien les appartements, où Pierre Radamante (Maurice Lemaitre) mène avec ses deux complices, Voringe (Bernard Musson) et Fredor (Jean Aron) de douteuses expériences
Au fait Rhadamanthe, dans la mythologie grecque est bien un des trois juges des Enfers, avec Minos et Éaque…
Vêtue d’une simple chemise vaporeuse, la Vampire nue (Caroline Cartier) a séduit d’emblée Pierre (Olivier Rollin) fils de Radamante qui veut savoir comment et pourquoi, dans un étrange hôtel particulier de l’Île Saint-Louis, des jeunes gens et jeunes filles bien élevés viennent se livrer à une sorte de liturgie suicidaire et se font assassiner avec volupté. Et ceci afin de procurer du sang frais à une étrange prisonnière. Pierre se heurte à son père, qui paraît, avec ses associés, vivre dans un monde à part, qu’il ne pénètre pas. Avec son ami peintre Robert (Pascal Fardoulis) il tente de pénétrer le mystère.
Jusque-là on pourrait se contenter des trouvailles visuelles du réalisateur, qui ne sont ni grotesques, ni négligeables ; il y a même d’assez beaux clichés, décentrés, colorés, filmés avec minutie, comme l’arrivée avec des flambeaux des mutants pour mettre fin à l’entreprise de Radamante (car c’est ça : les prétendus vampires sont en fait des mutants).
Mais, même si on n’y attache pas une importance majuscule, l’indigence du scénario paralyse le spectateur le plus bienveillant : c’est vraiment trop minable.