Pas de week-end pour notre amour

Nullitas nullitatis et omnia nullitas.

Non, j’exagère dans mon latin de cuisine qui couronne ce message ; Pierre Montazel a été un excellent directeur de photographie de nombre de films importants (Antoine et AntoinetteTouchez pas au grisbiRazzia sur la chnoufLa chatte). Il a même mis en scène un tout à fait charmant Paris chante toujours (1951) où, de façon très artificielle mais bien bâtie se déroule dans Paris une sorte de jeu de piste empli de parenthèses chantées par les meilleurs interprètes de l’époque où Clément Duhour et Madeleine Lebeau sont évidemment promis à se tomber dans les bras, in fine, alors qu’ils étaient, à la base, profondément antagonistes.Pas de week-end pour notre amour s’établit sur l’invraisemblable faveur dont Luis Mariano,structure de caramel mou mais monument de notoriété, a joui dans les années Cinquante. Lorsque, vers 1962 ou 63, à l’aube de mes 15 ou 16 ans, j’étais interloqué par l’hystérie manifestée par les groupies des Beatles, ces scènes de filles hurlantes, pleurantes, ridicules, je ne me souvenais naturellement pas des mêmes scènes dingues qui, avant-guerre avaient exhibé les admiratrices de Tino Rossi (qui s’enchaînaient aux portes de sa villa ajaccienne pour le voir et quelquefois le toucher) et de la folie qui avait entouré l’entrée sur la scène de Luis Mariano dont les plus immenses succès (La belle de CadixViolettes impériales) datent du début des années 50.

Le film de Montazel se bâtit sur cette extraordinaire notoriété, sur la folie qui entrainait de nombreuses jeunes femmes à ridiculiser leur vie devant une sorte d’idole, inconnue de la plupart mais absolument révérée.

Scénario d’un vaudeville poussiéreux destiné aux belles soirées assoupies d’un casino de station thermale modeste, Allevard ou La Bourboule : l’annonce du prochain mariage de la vedette internationale Franck Reno (Luis Mariano) provoque un séisme mondial : ses admiratrices, qui espéraient toutes pouvoir décrocher le pompon, sont folles de jalousie et exigent de rencontrer leur idole dans une soirée organisée par son fan-club. Mais au lieu de la vedette attendue, c’est la journaliste Margaret Duval (Maria Mauban) qui se présente et entreprend d’expliquer à la salle hystérique ce qui s’est passé les derniers temps. Le film est donc un flashback un peu ridicule.

En fait Reno est le fils renié par son grand-père, le baron Richard de Valirman (Jules Berry), riche industriel qui vit dans une grande demeure provinciale avec sa fille Gabrielle (Denise Grey), son gendre Alvarez (René Stern) et son petit-fils Christian (Bernard Lajarrige), qui est donc le frère de Reno. Ce petit monde est servi par Constantin (Louis de Funès) et reçoit pour de longs séjours Bertrand Touquet (Jean Ozenne) associé du baron Richard et sa fille Laurie (Anne Laurens).

Si on m’a suivi jusque là, on aura eu bien du mérite, d’autant qu’il me faut ajouter que le baron, victime d’une attaque, demande à revoir de toute urgence le petit-fils Reno, qu’il a chassé trois ans auparavant quand il a appris sa vocation artistique et son désir dy faire carrière.On met tout ça dans la centrifugeuse et on appuie ; on multiplie les quiproquos, les changements amoureux, les retournements de situation. On fait intervenir quelques numéros chantés où Mariano fait admirer ses roucoulades et tout se termine bien.

Si Denise Grey est presque aussi exaspérante que dans La boum, mais toujours dans le même registre électrisé, si Louis de Funès tourne là un des premiers films où il fait autre chose que de la figuration (sans éclat, au demeurant) on est bien triste de constater une nouvelle fois que sa dépendance au jeu entrainait le grand Jules Berry à tourner des n’importe quoi pareils.

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