La tête en friche

Gentil. Niais.

J’aurais bien aimé avoir le point de vue des nombreux amateurs du film,  mais, à l’évidence, c’est celui de ceux qui ne l’apprécient pas que je partage.

Je suis parti bravement, plein de sympathie pour le sujet, et bien que je n’aie pas pour Jean Becker une grande estime. Il est le fils de Jacques Becker et il y a eu toujours entre eux la distance abyssale qui sépare Alexandre Dumas, l’auteur du Comte de Monte Cristo d’Alexandre Dumas fils, l’auteur de La dame aux camélias.

Si L’été meurtrier est resté dans les mémoires, malgré l’absurdité empanachée de l’histoire de Sébastien Japrisot, c’est grâce à la plastique impeccable d’une Isabelle Adjani au mieux de sa beauté ; mais Elisa (où il a essayé de refaire un bon coup avec une Vanessa Paradis déshabillée et (déjà !) un grassouillet Depardieu, était médiocre. Un crime au paradis, remake de La Poison de Guitry est une mauvaise action qui n’aurait pas dû exister.

Reste Les enfants du marais, dont j’aime assez l’atmosphère campagnarde et Douce France, mais c’est tout de même assez limité. Becker est un réalisateur pour soirées consensuelles de TF1 ; c’est une sorte de correspondance cinématographique du Journal télévisé de 13 heures présenté par Jean-Pierre Pernaut ; ce qui n’est pas forcément un reproche : ça vaut autant que les prétentieux qui nous bourrent la tête avec le Devoir de mémoire et autres flagellations masochistes.

afternoons with margueritteDans La tête en friche, tout se joue sur le contraste entre la délicieuse Marguerite, fragile comme une fleur de pissenlit, et aussi délicate que ses étamines (Gisèle Casadesus, qu’on n’a jamais vu mauvaise) et ce grand lourdaud de Germain, massif comme un sanglier ; il y a un côté Laurel et Hardy dans cette mise en perspective, encore accentuée par le fossé intellectuel qui sépare ces deux naufragés (elle parce qu’elle est en train de se perdre dans le grand âge et la cécité, lui parce que c’est de tout temps qu’il dérive). Je note que le Depardieu inculte et rédimé par les livres, nous l’avons déjà vu il y a vingt ans, dans un film qui n’est pas meilleur, Uranus de Claude Berri, d’après Marcel Aymé ; et même si nous savons tous que notre poids lourd national est un être infiniment plus fin que ne le laissent penser les crottes de bique qu’il tourne sans discernement et sans discontinuer, je n’arrive pas à m’accrocher à son jeu.

Je dois dire que je ne me souviens pas du tout de la fin de La tête en friche qu’évoquent l’une avec tendresse, l’autre avec stupéfaction nos amis. Peut-être me suis-je endormi à ce moment-là (avant de me réveiller et de me passer l’effroyable Picpus de Richard Pottier ; décidément, affreuse soirée !) ; Germain enlève Marguerite, il me semble, mais… ? Rafraîchissez-moi la mémoire…

Ah ! Quelle dégaine affreuse a Claire Maurier qui fut la si séduisante Gilberte Doinel, la mère d’Antoine dans Les Quatre cents coups, qui disparut des écrans 13 ans, entre 1983 et 1996, pour revenir, déjà un peu tapée, dans Un air de famille de Cédric Klapisch (la mère désagréable de Bacri et de Yordanoff) puis dans Le fabuleux destin d’Amélie Poulain (la bistrote) mais qui a l’air de vouloir devenir une des plus vilaines femmes du cinéma français de tous les temps. Tempus fugit !

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