En effeuillant la marguerite

Ce soir les jupons volent !

En général, la médiocrité de Marc Allégret ne fait de doute pour personne. D’abord giton d’André Gide lors de son voyage au Congo, ce fils de pasteur protestant a pourtant filmé quelques trucs satisfaisants : Entrée des artistes (1938), Félicie Nanteuil(1945), Blanche Fury (1948)… Mais il s’est éteint au fur et à mesure que l’étoile de son cadet Yves, auteur de plusieurs grands ou très grands films, Dédée d’Anvers (1947), Une si jolie petite plage (1949), Manèges (1951), Les miracles n’ont lieu qu’une fois (1951). Mais lui et l’autre ont connu des fins de carrière moins brillantes, effacés, étouffés par la hargne cannibale de la Nouvelle Vague.

Disons d’abord bien nettement qu’En effeuillant la marguerite n’apportera pas davantage de prestige à la filmographie de l’aîné et que L’Abominable Homme des douanes en 1963 marque sa bien triste fin de carrière (mais tout comme Mords pas, on t’aime en 1975 pour le cadet). Le scénario, paresseusement rédigé par le réalisateur er par Roger Vadim (qui signe aussi les dialogues) est d’une remarquable insignifiance et même d’une totale nullité, il ne faut pas hésiter à le dire.

Lors de la sortie de En effeuillant la marguerite le 5 octobre 1956, Brigitte Bardot avait déjà acquis une petite notoriété et avait même tourné un film en vedette : Manina la fille sans voile de Willy Rozier en 1953. Mais surtout elle a épousé Roger Vadim le 21 décembre 1952, qui a senti qu’il détenait en elle un trésor fabuleux.

Petite notoriété d’une starlette charmante et attirante, mais dont l’explosion ne s’épanouira que quelques mois plus tard, le 26 décembre 1956 avec la sortie sur les écrans de Et Dieu… créa la femme qui fut une bombe explosive mondiale. En attendant on pouvait faire bouillir la marmite en filmant de petites choses vaguement grivoises qui satisferaient le public du samedi soir. Car – clin d’œil polisson !- le film se passe en partie – en petite partie ! – dans le milieu du cabaret et expose quelques numéros – bien trop furtifs – de strip-tease qui permettaient de montrer dans une époque pudibonde quelques jolis seins et quelques jolies fesses. Ce petit trompe-couillon n’a pas été tout à fait perdu, puisqu’il mettait en disposition favorable et égrillarde les couples de spectateurs, après le retour dans l’appartement, en lui permettant de contribuer au regretté baby-boom.

Donc, à Vichy, Agnès Dumont (Brigitte Bardot), jeune fille mutine et un peu effrontée, fille d’un général (Jacques Dumesnil) scrogneugneu et pète-sec a écrit une sorte de chronique des ridicules, bouffonneries, petits scandales de la ville d’eaux. Son père veut l’envoyer en pension, mais elle ne rêve que de Paris où son frère Hubert (Darry Cowl) prétend être devenu un peintre célèbre. À la Gare de Lyon elle fait fortuitement connaissance de deux journalistes dragueurs, Roger Vital (Robert Hirsch), le photographe et Daniel Roy (Daniel Gelin) le reporter.

En fait Hubert, le frère d’Agnès n’est pas peintre connu mais gardien du musée Balzac. Y logeant et sans le sou, Agnès, de toute bonne foi ou à peu près, dérobe une édition originale dédicacée du Lys dans la vallée et va vendre ce trésor à un libraire. Une fois le vol découvert, il s’agit de racheter le volume et, pour cela, une seule solution se présente : participer et gagner un concours de strip-tease amateur richement doté.

D’où toute une suite de quiproquos, de dissimulations et de calembredaines diverses puisque la finale – Agnès en fait évidemment partie – a lieu à Vichy et y est invité le général Dumont, père d’Agnès.

Mais naturellement tout se termine bien puisque Magali (Nadine Tallier, future baronne de Rothschild), ex-maîtresse de Daniel/Gélin se substitue à Agnès, que les apparences sont sauves et que les amoureux pourront se marier !

C’est bête à pleurer.

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