36 quai des Orfèvres

Histoires dans la nuit.

C’est là un film curieux, cousu de grosses ficelles, mal fagoté, avec des invraisemblances tellement outrancières qu’elles rappellent celles des romans-feuilletons du 19ème siècle. Mais en même temps, paradoxalement, il y a dans d’autres séquences, un réalisme parfait des situations ; ainsi l’attaque du fourgon bancaire du début, ainsi l’extrême violence de la plupart des protagonistes (je ne parle pas gratuitement, ou sur la foi d’impressions : il se trouve que, professionnellement j’ai jadis approché le milieu policier, sans pour autant en faire partie).

Ce patchwork me semble la grande faiblesse du film : on a artificiellement cousu  des séquences dont beaucoup sont inspirées de faits réels, de situations avérées, mais pour en faire une sorte de florilège, de « best-off » en les mettant toutes ensembles dans le shaker ; quand il est souplement composé d’ingrédients qui s’accordent, le cocktail peut être une chose excellente ; mais ce n’est pas toujours le cas et la cohérence souffre de ces accordailles non réussies.

On voit qu’Olivier Marchal s’est appuyé sur des anecdotes absolument réelles et qu’il n’a eu de cesse que de les placer, pensant donner un brevet de réalité : or, si ça peut faire un bon reportage sur l’extraordinaire violence des crapules actuelles (un peu comme le bon Truands de Frédéric Schoendoerffer), ça ne fait pas un film…

Quant à la seconde partie, larmoyante et invraisemblable, elle donne la pénible sensation d’un roman-feuilleton sans l’humour et la grandiloquence délicieuse qui fait tout le charme de Fantômas… Plus on avance et plus on s’enlise dans un récit sans intérêt, comme formaté pour la télévision. C’est bien dommage parce que la vision presque romanesque et pleurnicharde l’emporte alors sur la sécheresse cruelle qui donnait sa qualité au début du film.

Et plus on va, d’ailleurs, plus on remarque la grandiloquence des dialogues, les postures des acteurs, la dimension emphatique des péripéties.

36 quai des Orfèvres souffre d’être, à l’image de Gérard Depardieu, un film boursouflé, souvent grandiloquent ; cela étant, c’est spectaculaire et ça se laisse voir sans déplaisir.

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