Bilitis

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Esthétique imposture

Si, dans toute l’histoire du cinéma, il y a quelque chose qui peut collectivement être baptisée du charmant sobriquet de « trompe-couillon« , c’est bien l’œuvre entière, atterrante dans sa prétention érotique, de David Hamilton !

Je suis assez vieux pour avoir vécu à une époque cinématographique où la simple vision d’un sein dénudé suffisait à nous faire monter le rouge aux joues, ce qui n’était pas désagréable ; puis les choses se sont ouvertes, sans doute un peu trop vigoureusement ; mais jamais je n’ai eu autant l’impression d’une complaisance louche que dans ces Bilitis et autres conneries…

Certains, nous avons compris, ont  une vieille affection pour l’œuvre de David Hamilton , une de ces affections incompréhensibles, mais tenaces qui ne sont ni explicables, ni critiquables…

Une de ces failles qui nous rendent si miraculeusement humains….

Halte au feu sur Bilitis et tutti quanti…

Après tout,- et je ne m’en vante pas plus que ça ! – j’ai, moi aussi, des passions cinématographiques bizarres, comme Ah ! les Belles bacchantes de l’immortel Jean Loubignac (non je ne déconne pas !) ou Paris chante toujours du regretté Pierre Montazel

Pour avoir beaucoup avoué, il nous sera beaucoup pardonné !

Rappelons aussi que « Contemporaine et rivale de Sapho, Bilitis, jeune grecque de Turquie, vivant sur l’île de Lesbos, au VIème  siècle av. J.-C. signa des poèmes sulfureux et passionnés. « Les Chansons » de Bilitis furent publiés en 1894 dans une traduction savante de Pierre Louÿs, l’ouvrage est précédé d’une Vie de Bilitis, retracée par le traducteur et suivi de plusieurs pages de notes… en fait, Pierre Louÿs en est l’auteur réel, il y déploie toute son érudition et connaissance des textes poétiques grecs, en prenant garde d’éviter la pédanterie pour rester crédible : c’est l’amour pour la langue, un style simple et le plus juste possible, qui permet de dégager une grande force au service de la sensualité et de l’amour saphique. Pierre Louÿs composa une suite à cette mystification littéraire, intitulée « Les Chansons secrètes de Bilitis » mais signant cette fois de

photo-Bilitis-1976-1Le nom de Pierre Louÿs doit être inconnu de beaucoup ; écrivain fin de siècle (le 19ème !) il demeurera célèbre pour son goût de l’érotisme, voire de la pornographie (« Trois filles de leur mère » est un des textes les plus troubles que je connaisse) ; sur le sujet qui nous intéresse ici, le cinéma, il a inspiré au moins deux films – ou deux séries de films – : Les aventures du Roi Pausole et surtout La femme et le pantin qui a donné lieu à de multiples adaptations, dont celles de Sternberg et celle de Duvivier.

Polémique sur le film de David Hamilton ? Non ! plaisanteries sur ces films qui, pour la plupart d’entre nous, ne sont pas du cinéma mais un prétexte à montrer de très jeunes filles nues, sensibles à l’attrait de leur propre sexe…

J’ai vu Bilitis et autres nouilleries à leur sortie sur ces écrans et le cochon qui sommeillait en moi (à l’époque : désormais je suis plutôt un vieil alligator) en avait été fort déçu, infiniment plus que par Emmanuelle qui avait au moins le front de se présenter pour ce qu’il prétendait être, un manuel de libération sexuelle (mais fort inférieur, catastrophiquement inférieur au livre dont il était issu).

Certains aiment la lumière de David Hamilton ? On peut le concevoir, elle est vraiment esthétisante et consensuelle ; d’autres  la musique de Francis Lai ? Ma foi… Ce sont ceux-là qui apprécient Lelouch ? C’est peut-être bien là le problème….

Écrivant ceci, j’ai conscience d’être un peu polémique ; qu’on ne le prenne pas mal ; de jolies jeunes filles nues ne sont jamais un spectacle désagréable, j’en conviens ; mais je ne suis pas sûr que ce soit du cinéma…

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