Candyman

Et on tuera tous les affreux !

Voici un film singulier et assez barbare. Que puis-je vraiment en dire ? D’abord, un peu naïvement, que je ne devrais pas, compte tenu de mon grand âge, prétendre me mesurer à ce que l’on pourrait presque appeler des franchises, ensemble de films suivi par leurs amateurs avec ferveur et impatience, dont les péripéties, assises sur une trame plus ou moins solide, développent à l’envi des péripéties organiquement similaires. Ce Candyman de 2021 est en effet à la fois la suite et le remake d’un premier opus, daté de 1992, réalisé par Bernard Rose, qui fut suivi en 1995 par Candyman 2 de Bill Condon puis, en 1999 par Candyman 3, le jour des morts de Turi Meyer.

Ma science là-dessus doit tout à notre amie Wikipédia que je viens de consulter avec profit, car jamais je n’avais entendu parler de ce tueur en série, personnage dont les États-Unis d’Amérique nous abreuvent sans rechigner. Au demeurant, quatre films seulement pour une série comme ça, c’est plutôt maigre au regard de Ghosface (Scream, 5 films), Freddy Krueger (Les griffes de la nuit et suites, 9 films), ou Pinhead (Hellraiser et suites 11 films) et le recordman Jason (Vendredi 13 – 12 films).

Candyman est un abominable personnage doté d’un crochet meurtrier en guise de main gauche, qui assassine femmes et enfants dans le sinistre ghetto noir de Cabrini-Green, à Chicago. La légende urbaine forgée autour de lui veut qu’on puisse le faire surgir en prononçant son nom cinq fois de suite devant un miroir. Pourquoi pas ? Est-ce un individu particulièrement cruel et habile qui sait se dissimuler dans le quartier ou une créature surgie de l’enfer dès qu’on l’évoque (ou dès qu’il lui prend la fantaisie de venir zigouiller un peu de monde) ?

Je n’ai pas bien saisi. Et il ne faut pas compter sur moi pour explorer dans tous les détails cette légende-là, qui est bien trop loin de mon univers pour m’intéresser vraiment. Pour autant la version du mythe présentée par la réalisatrice noire Nia DaCosta ne manque pas tout à fait d’intérêt. Ne serait-ce que parce que c’est un film violemment politique qui ne met en scène que des acteurs noirs et qu’il porte un discours sous-tendu par la rancœur. Car, si j’ai à peu près saisi, la légende date du lynchage et de la torture de Daniel Robitaille, un jeune noir, à la fin du 19ème siècle. Poing coupé, oint de miel pour être piqué par des milliers d’abeilles puis jeté au feu, le pauvre malheureux revient périodiquement se venger sous l’apparence du monstrueux Candyman.

La réalisatrice a mixé ces données avec une réflexion sur la gentrification du quartier de Cabrini-Green, d’où les taudis ont été rasés pour être remplacés par des immeubles de rapport. Immeubles dont les appartements sont ensuite proposés aux nouvelles couches professionnelles friquées, publicitaires, financiers, artistes de toute obédience. C’est précisément le cas du couple qui est au devant de la scène dans le film : lui, Anthony McCoy (Yahya Abdul-Mateen II) est un peintre de grand talent, dont l’inspiration semble d’abord un peu en panne ; elle, Brianna Cartwright (Teyonah Parris) dirige une galerie d’art qui commence à prendre de l’importance et à être reconnue sur le marché. Au fait, dût la chose choquer, je ne vois guère la différence dans le domaine de la loi du marché entre le logement et la peinture : tout est affaire de tendance.

À partir de ce moment-là – c’est-à-dire presque dès le début – je ne comprends plus rien de ce qu’a voulu faire la réalisatrice. Je crains, à dire vrai, qu’elle ait voulu hausser son propos assez au delà de ce qu’elle pouvait faire : vouloir inclure dans une vaste fresque des sujets divers, vastes et complexes est sans doute louable, mais court le risque de se disperser jusqu’à le rendre impénétrable. Le récit est tellement embrouillé, les personnages si mal caractérisés, les épisodes si mal construits qu’on s’ennuie fermement.

Et ce ne sont pas les dernières séquences, violemment gore qui vont arranger les choses : dans ce domaine, il en faut tellement plus pour étonner !

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