Conte de printemps

Déséquilibre

Fervent admirateur de Rohmer, je ne suis pas très convaincu par ce premier des Contes des quatre saisons qui, après les Contes moraux et les Comédies et proverbes inaugure une nouvelle orientation de l’auteur du Genou de Claire et de Ma nuit chez Maud

J’apprécie particulièrement chez Rohmer, dix-huitiémiste de notre cinéma, cette capacité singulière qu’il a de dérouler les longs méandres subtils des relations entre les êtres, relations amoureuses, ou – plutôt – relations de séduction ; à travers un dialogue toujours extrêmement écrit, dont ses détracteurs jugent qu’il sonne faux alors qu’il est, comme celui de tous les moralistes d’un réalisme absolu dans la reconstitution du cheminement des sentiments (et, évidemment, non pas dans la retranscription des propos tenus), Rohmer fait rejouer à tous ses interprètes l’éternel jeu de l’accès à autrui (autrui dont, selon Jules Romains, l’existence n’est, après tout, pas si démontrée que cela).

Mais si Rohmer excelle dans la mise en scène des tournants imperceptibles, des gradations minuscules, des découvertes microscopiques, des sens aléatoires que prennent les esprits (et les cœurs !) des humains, il me semble qu’il est bien plus à l’aise lorsque la relation concerne un homme et une femme.

Et c’est, à mon sens, là où, dans Conte de printemps, le bât blesse : tout tourne autour de la rencontre et de l’amitié spontanée (mais finalement assez artificielle) qui rassemble (seulement un temps sans doute) Jeanne (Anne Teyssèdre), professeur de philosophie, et la bien plus jeune Natacha (Florence Darel) ; le personnage masculin, Igor, le père de Natacha (Hugues Quester), occupe, finalement un rôle de second plan, même si sa fille parle beaucoup de lui ; et Igor n’a pas beaucoup plus d’importance que sa jeune maîtresse, Ève (Eloïse Bennett) qui a l’âge de Natacha…

Ce déséquilibre me semble orienter le film vers une mauvaise pente, superficielle et verbeuse…

Cela dit, comme c’est du Rohmer, on ne s’y ennuie naturellement pas !

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