Gribouille

gribouille

Tragi-comédie d’un homme ridicule.

Dans une des plus épouvantables éditions du margoulin René Chateau, avec un son à la fois plein de souffles divers et souvent incompréhensible, et une image à peine convenable, ce Gribouille jamais vu jusqu’alors n’est guère visible que pour le grand Raimu, ce qui est, à dire vrai, une raison suffisante.

Si les dialogues de Marcel Achard sont réussis, drôles, spirituels, et font mouche assez souvent, le scénario, du même, est assez bêta et sa fin est totalement bâclée : on dirait qu’Achard n’a pas pu choisir entre un mélodrame édifiant (où les faux-semblants s’anéantiraient, à la fin, dans le bonheur, difficilement gagné, de tous les protagonistes), une comédie légère et moralisante (où le risque du Démon de midi serait évoqué et moqué) et un drame noirâtre (où la paix des couples, jeunes et vieux, serait dévastée par une intrigante). C’est donc une tragi-comédie qui ne sait pas trop où aller, la tragi-comédie d’un homme ridicule.

Gribouille-2Seulement, quand cet homme ridicule est interprété par le grand, par l’immense Raimu, il y a tout de suite plus de sel dans des péripéties qui, sans lui, seraient insignifiantes, et même agaçantes ! Voir un acteur au physique finalement assez banal mettre dans son jeu, dans ses expressions, dans le ton de sa voix tant de nuances, tant de finesses, tant de richesses… c’est peut-être encore plus exceptionnel dans un film moyen que dans les grands Pagnol où le texte est en soi remarquable, où le film a une vie autonome.

Michèle Morgan, qui avait alors dix-sept ans, en fait nettement plus ; elle est remarquablement jolie, mais, comme à peu près toujours, exaspérante par la fausseté de son jeu. Carette est très bien, comme toujours, Andrex, gentil professeur de gymnastique au début, commence à se révéler en son rôle habituel de faux-cul, Gilbert Gil, l’excellent Pierrot de Pépé le Moko est là bien mièvre, on voit le sévère Jacques Baumer tout en aspérité et brutalité bourgeoises, et un Bernard Blier débutant (non crédité au générique) tout en rondeurs fleurs-bleues.

Il y a des scènes assez bien troussées, quelquefois trop écrites, trop théâtrales, mais vraiment fondamentalement, c’est la faiblesse de la structure du scénario qui l’emporte. Heureusement, le grand Jules est là…

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