Kramer contre Kramer

Autopsie d’un naufrage.

Kramer contre Kramer n’est pas un film déplaisant, ni même désagréable, mais il est tout de même un peu insuffisant pour bénéficier plus de quarante ans après sa sortie, d’une telle renommée et pour avoir récolté une pluie de récompenses et un très grand succès public. Sans doute la qualité de l’interprétation y est-elle pour grand chose, tant elle est exemplaire. En premier lieu Dustin Hoffman (Ted Kramer, le mari abandonné) mais aussi, peut-être surtout Justin Henry (Billy, le petit garçon) qui reçut pour son rôle l‘Oscar du second rôle, à l’âge de 8 ans, plus jeune acteur jamais distingué dans ce palmarès. Meryl Streep (Joanna Kramer, la mère), beaucoup moins présente à l’écran, d’ailleurs, est également excellente dans ce personnage de paumée un peu déséquilibrée, plutôt immature.

Mais le succès du film me semble avant tout dû à son sujet, aux thèmes abordés : ceux de l’explosion en plein vol d’une famille et la lutte féroce que se livrent les deux parents pour obtenir la garde de leur jeune enfant.

Ayant écrit cela, je me ravise : en fait ce n’est pas du tout ça. L’explosion que j’indiquais est immédiate et survient au tout début du film sans que guère ne soit montré de ce qui l’a engendrée. Et la lutte pour l’appropriation du jeune garçon se résume avant tout à un combat de vingt ou vingt-cinq minutes entre deux avocats tortueux et vicelards, comme c’est le cas dans la plupart des films de procès, genre si prisé aux États-Unis.

Entre les deux, c’est-à-dire pour la plus grande partie du film, il s’agit du combat douloureux, difficile et réussi de Ted Kramer, publicitaire talentueux qui, trop pris par sa charge de travail, s’est laissé dévorer par le système sans s’apercevoir que sa femme, rêveuse, un peu sotte, s’ennuie ; et surtout culpabilise de ne pas aimer assez son enfant. Donc, un beau soir, alors que Ted fou de joie revient à la maison après avoir obtenu une belle promotion, avec la conduite d’un important dossier, Joanna fiche le camp, laissant son mari et son fils stupéfaits et décontenancés. Ted ne peut pas s’appuyer sur grand monde et ne trouve d’écoute que chez Margaret Phelps (Jane Alexander), voisine et amie de sa femme, naguère elle-même abandonnée par son mari Charley.

Le début de la nouvelle vie du couple père/fils est très convaincant : le lever matinal pour l’école, la préparation du petit déjeuner (une immonde mixture faite de toasts de pain de mie trempés dans un mélange de lait et d’œufs et rôtie à la poêle), la lecture de l’histoire du soir, le rangement des jouets éparpillés dans l’appartement, etc. De ce fait, Ted est moins présent, moins attentif, moins inventif au travail et se le voit reprocher par son supérieur hiérarchique et ami Jim O’Connor (George Coe). Ça patouille de ce côté-là mais Ted se rapproche de plus en plus de son fils. Et Billy, qui regrette très fort sa mère n’est pas plus choqué que ça de voir Phyllis Bernard (JoBeth Williams) sortir toute nue du lit de son père, dont elle est la collègue. Émoi lorsque, dans un jardin public, le garçon tombe d’un portique et manque de s’éborgner…

À partir de là commence le film de procès avec le désir de Joanna/Streep de récupérer son fils. Ça patauge et on s’ennuie un peu. On ne comprend pas que le Juge accorde la garde de l’enfant à sa mère, qui s’est montrée bien médiocre pendant les débats. Et puis la fin du film, larmoyante et absurde où Joanna renonce à sa victoire et laisse Billy à son père aimant et disponible.

C’est bien fait, on suit sans peine les péripéties qui surviennent avec un bon rythme, mais ainsi que dit supra, ça ne vaut pas un triomphe.

 

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