La tête contre les murs

La folie ordinaire et banale.

Dans notre malheureuse époque où l’ensauvagement est quotidien, il n’est pas rare qu’après un assassinat furieux – sous prétexte islamique ou non – il y ait, après le drame, cette sorte de mantra qui expose que le tueur était frappé de troubles psychiatriques. En d’autres termes qu’un individu incertain et fragile, capable d’aller tuer n’importe qui (c’est-à-dire vous ou moi) qui a connu des soins dans un établissement spécialisé a été jugé par des médecins ou des éducateurs tout à fait capable de rejoindre le monde quotidien qui est le nôtre. Voilà un vrai sujet, sur quoi je n’ai pas d’opinion tranchée : peut-on, ou non, guérir de ces troubles-là ? Je n’en sais rien et je crains que ceux qui la ramènent, dans un sens ou un autre, ne soient pas très crédibles.

Qu’on le veuille ou non, La tête contre les murs est ce qu’on appelle un film à thèse ; un film qui oppose deux conceptions de la médecine psychiatrique : celle du docteur Varmont (Pierre Brasseur), rigoriste, scrupuleuse, brutale, vouée à la seule défense de la Société et celle du docteur Emery (Paul Meurisse) qui estime que l’interné est un malade que l’on peut guérir et qu’il faut lui faire confiance.

Je ne sais pas comment le subtil Georges Franju à qui toutes les qualités du film doivent être créditées, a pu supporter de tourner un scénario aussi mal fichu, aussi mal rythmé, aussi peu crédible. Il apporte en tout cas son sens de l’image belle, poétique, onirique, subtile, de ces atmosphères forestières, embrumées, nocturnes. Grâce à Dieu, il trouvera deux ans plus tard, grâce à Boileau et Narcejac le substrat du chef-d’œuvre Les yeux sans visage. Mais là il ne peut que courir après les errements souvent niais qui l’obligent à présenter un film désarticulé.

Comment comprendre que François Gérane (Jean Pierre Mocky), jeune homme bringueur, joueur, désinvolte soit, après une algarade avec son père, important avocat (Jean Galland), sévèrement interné dans la maison de santé – l’asile de fous, plutôt – du docteur Varmont/Brasseur et y demeure claustré ?

Au milieu de vrais cinglés dont la panoplie est assez spectaculaire et d’où émerge seulement le tendre Heurtevent (Charles Aznavour) ? On sait bien que l’asile de fous est un intéressant terroir pour le cinéma : Shock corridor de Samuel Fuller (1963) ou de Vol au-dessus d’un nid de coucou de Milos Forman (1975), voire la fin de La symphonie pathétique de Ken Russell (1971) montrent les étranges comportements de gens qui ont quitté le monde de la réalité pour se réfugier dans de drôles de rêveries.

Le film est très beau, très bien réalisé, mais tellement, tellement niais et mélodramatique dans son propos ! Quel dommage…

 

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