Le chant du Missouri

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Premier chef-d’œuvre de Minnelli

Comment, d’une histoire assez banale, presque mièvre, en tout cas très anodine (des jeunes filles rêvent à l’amour, leurs jeunes sœurs sont espiègles et joueuses, un couple vit paisiblement dans une certaine prospérité, une ville se prépare à un événement notable, mais nullement tragique – de ce tragique qui fait les bons scénarios haletants – ) comment d’une histoire où l’Histoire n’est qu’à peine présente, arrive-t-on à réaliser un film aussi délicieux et profond ?

Comment, alors qu’on ne voit pas la moindre trace qu’aurait pu laisser la guerre de Sécession (il est vrai terminée quarante ans auparavant et où l’État du Missouri n’a pas joué un rôle majeur), alors qu’on n’aperçoit ni Noir, ni ouvrier, mais uniquement des bourgeois prospères, que la vie semble se passer entre fêtes pour grands ou petits, réunions de familles, petits chagrins et secrets tendres, comment ce film n’apparaît-il pas purement artificiel ?

Une première réponse, un peu formelle, peut sans doute être donnée par la date de sa réalisation : en 1941, compte tenu d’un contexte international qu’on pourrait qualifier de tendu si l’on ne craignait pas d’aller trop loin dans la litote, en 1941, il n’est tout de même pas question de montrer une image sombre des États-Unis.

3659178002Mais je crois qu’il y a bien davantage : la magie de Minnelli : virtuosité du maniement des caméras et utilisation fastueuse de la couleur (et c’est vrai : c’est un chatoiement exceptionnel, même dans les séquences nocturnes et hivernales).

Mais il faut aussi citer la qualité extrême de la musique  portée par le talent immense d’une Judy Garland au sommet de son talent (elle a 22 ans) et qui possède un abattage, un brio, une justesse de ton sublimes ; et comme les chansons de Hugh Martin et Ralph Blane sont dans tous les inconscients des cinéphages (et en premier lieu le célébrissime Trolley song, mais aussi Skip to My Lou et les autres), toute cette joie de vivre donne un film magnifique qu’il serait dangereux de ne pas voir…

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