Le plus beau métier du monde

Nos tendres banlieues.

Le hasard a voulu que, juste après que j’ai dit tout le bien que je pensais des adaptations données par François Leterrier du travail de Gérard Lauzier, le hasard a fait que passe à la télévision, sans doute dans la perspective de la rentrée des classes, un des films les plus notoires de l’auteur de bandes dessinées, ce Plus beau métier du monde qui est bien maladroit, emberlificoté, prévisible, mais quelquefois, aussi, efficace au point qu’il en devient glaçant.

Au milieu de péripéties vaudevillesques sans aucun intérêt, les démêlés de Laurent Monier (Gérard Depardieu) avec sa femme Hélène (Michèle Laroque) puis avec sa collègue Radia (Souad Amidou), le film présente la vie quotidienne d’un collège de la banlieue parisienne. Le film date déjà de près de vingt ans et le constat terrifiant qu’il dresse, sans appuyer trop sur le trait, d’un territoire en état de putréfaction a gardé toute sa pertinence (sans doute faut-il même penser que la situation s’est encore dégradée depuis lors).

le-plus-beau-metier-du-monde_51244_1On regarde ces immeubles esquintés, ces classes-foutoir, ces caïds à peine majeurs qui roulent en voitures de sport, rackettent, volent et violent comme si c’étaient là de seules images de cinéma, on s’esclaffe lorsque Depardieu fait voler dans le décor la bagnole d’Ahmed (Roschdy Zem), sale petite racaille menaçante, on est bien content que la police arrête toute cette engeance et que la cité se mobilise dans un suave happy end consensuel, gluant de gentillesse et d’espoir en lendemains roses et bleus. Hello Kitty !

On voit bien que Lauzier n’a plus la flamme, ou qu’il a la flemme de se battre contre les moulins à vent de l’intelligentzia : il instille à toutes petites doses son venin, ne va pas jusqu’au bout des situations, ne tire pas toutes les conclusions des questions qu’il pose. Cela donne un film quelquefois du piètre niveau d’un sujet de prime time pour TF1, de temps à autre totalement désespérant. Avec, ici et là, de la lumière : comme elle est belle, cette petite Malienne, Malou (Prisca Songo), qui travaille, s’occupe de ses petits frères, seconde sa solide maman, essaye de s’en sortir et sans doute s’en sortira…

Il y a trente ans, vingt ans même, des voix graves et bien avisées pensaient et disaient que l’intégration des populations immigrées passerait par l’émancipation des filles. On n’en parle plus guère aujourd’hui ; les tournantes et les barbus ont pris le dessus, non ?

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