Le poison

Affiche Le poison - afficheQui a financé ça ?

On se dit qu’en 1945, les ligues antialcooliques qui avaient réussi à imposer aux États-Unis la ridicule Prohibition de 1919 à 1933 avaient encore de la ressource et des picaillons à dépenser. Parce que, s’il n’a pas été stipendié, il me semble impossible qu’un homme aussi civilisé que Billy Wilder ait pu tourner ce léger et grossier tout à la fois film de propagande à qui je donne une note moyenne de faveur, conscient que j’ai été souvent assez sévère envers ce réalisateur. Ma note tient aussi d’ailleurs au plaisir nostalgique que j’ai eu de voir arboré à l’écran un fort beau manteau d’ocelot. Nous étions encore à l’époque où la triomphante Vertu écologique ne s’était pas encore emparée du cerveau occidental et où les femmes portaient fourrure…

Je divague, mais un peu seulement ; sans doute parce que j’ai en tête de revoir bientôt un film autrement intéressant que ce simpliste Poison, autrement pesant, autrement profond, Le feu follet, sans doute le chef-d’œuvre de Louis Malle ; les deux films ne jouent pas dans la même catégorie, il est vrai (un peu comme si on comparait Les aventures de Superman à La recherche du temps perdu ; ou presque) et on est tout de même assez gêné de voir l’excellent Wilder se hasarder dans des momeries indignes.

Le Poison ocelotComment ça ? Mais par exemple, lors d’une représentation de La Traviata, la scène où, lors de la fête joyeuse (Libiamo ne’ lieti calici), Don Birnam (Ray Milland) l’écrivain imbibé qui essaye de se sevrer croit voir des bouteilles de whisky dans les poches des redingotes des valseurs sur la scène… Ou cette bouteille prétendument dissimulée à l’investigation du frère et de la fiancée de Birnam et suspendue contre la façade de l’immeuble par une ficelle… Ou encore ces continuels passages du pauvre garçon dans un bistro où le barman, qui a pourtant reçu des instructions formelles, ne cesse de lui verser des godets. Et parlons à peine de l’interversion des manteaux au vestiaire de l’opéra, petit procédé facile et niais pour faire se rencontrer Birnam et Helen (Jane Wyman).

Le poison -Le volHeureusement, ça s’assombrit graduellement et la déchéance de l’écrivain, qui, sans le sou, en vient à tenter de barboter un portefeuille au restaurant ou à mendier quelques dollars à une gourgandine qu’il a toujours repoussée alors qu’elle lui court après. La scène où il sombre dans les horreurs du delirium tremens n’est pas mauvaise, mais court largement derrière celle du Cercle rougeMontand impressionne bien plus fort…

J’avoue ne plus me souvenir de la fin du film ; je suppose que ça se termine bien, les fiancés réunis et la résolution prise par Burnam de ne plus boire…

Serment d’ivrogne.

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