Les contes de la lune vague après la pluie

Machin nippon.

Malgré mon ignorance et ma totale indifférence pour le Japon, sa culture, sa mentalité et même son existence, j’avais depuis longtemps résolu de regarder Les contes de la lune vague après la pluie. Pourquoi ? Exclusivement grâce au beau titre français, aux sonorités mélodieuses. Mais on devrait toujours se méfier de ce genre de curiosités bienveillantes : finalement, Mizoguchi, c’est aussi étranger et enquiquinant que tous les autres, Ozu ou Kurosawa ; ça se passe dans des contrées si exotiques qu’on n’en comprend rien, sur des modes et des rythmes qui sont si éloignés des nôtres qu’on doute vraiment qu’un Occidental puisse y piger quelque chose. Mais enfin, il y a toujours des gogos qui marchent dans l’exotisme.

Bon ; ça se passe dans la région du lac Biwa au début du 16ème siècle nippon. Inutile de dire que je n’ai pas la moindre idée de l’endroit, de l’île japonaise où se situe le lac Biwa et que l’histoire des débuts du 16ème siècle japonais m’est aussi inconnue qu’indifférente ; cela dit pour répéter ma vieille idée selon quoi on pige d’autant mieux l’esprit d’une œuvre qu’on en est structurellement plus proche ; parce que si on m’évoque les alentours d’un paysage français du temps de Louis XII ou de François Ier, je vois en revanche parfaitement de quoi il s’agit (le palais de Jacques Cœur ou le château de Chambord, par exemple).

Ces préalables étant exposés, je dois dire que j’ai failli couper très très vite la projection, du fait des musiques du générique, stridentes et désagréables, qui tapent particulièrement sur les nerfs. J’ai résisté, j’ai poursuivi. Deux familles de pauvres gens, à la base : Genjuro (Masayuki Mori) est un pauvre talentueux potier d’un coin minable et perdu ; il est marié avec la douce soumise Miyagi (Kinuyo Tanaka) de qui il a eu un petit garçon. La sœur de Genjuro, Ohama (Mitsuko Mito), est, elle, mariée avec une sorte de rêveur immature, Tobei (Eitar Ozawa) qui ne songe qu’à devenir samouraï.

Il faut dire que la région est parcourue par des guerriers qui sont avant tout des pillards, des bandes sans foi ni loi qui se nourrissent comme ils peuvent en volant et violant la population. Mauvaise époque : l’anarchie, l’absence d’État est la pire chose qui puisse arriver à un peuple. Comme de coutume, les femmes sont les gardiennes du foyer et de la raison ; comme de coutume, les hommes font des châteaux en Espagne.

Vont se greffer sur cette observation assez bienvenue deux histoires ridicules et mal fichues : l’une verra l’infantile Tobei, qui est par imposture, devenu un samouraï important retrouver, dans un bordel militaire, sa femme, contrainte pour survivre à se prostituer. L’autre aura une tonalité plus fantastique et parfaitement farfelue : Genjuro sera séduit – et d’ailleurs même davantage envoûté par une sorte de fantôme vivant, Dame Wakasa (Machiko Kyö), sorte de survivance d’une ancienne famille aristocratique restituée à la vie par la fidélité d’une nourrice. Mais pendant ce temps sa femme légitime aura été assassinée par des soudards.

On s’ennuie beaucoup pendant ces péripéties, mal datées, mal rythmées, terriblement lentes ; jusqu’aux moments où les Nippons entrent dans une sorte d’hystérie violente : on dirait que ces gens de très loin ne connaissent que deux états d’âme : la lenteur hiératique et l’hystérie guerrière.

Il y a de jolies images bien photographiées, dans des paysages d’une confondante médiocrité : c’est là que réside la seule qualité du film, qui n’est pas très long mais qui est très pesant, très ennuyeux, très scolaire. Il paraît que Mizoguchi, pour partir son pensum, est allé chercher des idées chez Maupassant. Sans blague ?

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