Monster

Affiche MonsterDu cinéma-vérité malsain.

Voyez-vous qui est Charlize Theron ? Une actrice sans aspérité particulière et en même temps une créature somptueuse qui fait de la publicité pour le parfum J’adore de Christian Dior en se dénudant tout au long de la Galerie des glaces au château de Versailles. Une belle, très belle fille, mais comme il y en a tant et tant dans les pages des magazines glamour et dans le cinéma mondial. Et dans Monster, c’est une pauvre fille crasseuse au physique rugueux, traquée de partout, forte et fragile à la fois, prostituée de toute sa vie et de toute sa vie vouée à la veulerie des hommes. C’est étonnant.

Le côté fascinant de cette transformation (prise de poids, maquillage, recours aux silicones et aux prothèses dentaires) est un des principaux intérêts de Monster, histoire vraie relatant le cheminement d’Aileen Wuornos, pitoyable tueuse en série de pauvres types qu’elle racolait au long des routes de Floride. Le film de Patty Jenkins montre avec passablement de complaisance la vie sordide de cette malheureuse violée dès l’enfance par son père et son frère, mère et prostituée dès l’âge de 13 ans, imbibée de bière et de tabac.

MonsterPresque par hasard, elle rencontre dans un bar louche Selby (Christina Ricci), gamine lesbienne rejetée par sa famille. Éblouissement mutuel, mais sur une fausse base : Aileen, dans sa vie de chiennerie et de dégoût de soi, rencontre quelqu’un dont elle voudrait être à la fois la mère protectrice, la compagne rassurante et l’amante douce. Selby est une merdeuse irresponsable et capricieuse, égoïste, odieuse, qui attend d’Aileen une vie de plaisir sans contrainte.

Ceci est le meilleur du film : le hiatus entre les deux pauvres femmes, la demande pressante que fait Selby à Aileen de continuer à se prostituer pour assurer au couple le maximum de fric vite gagné et, parallèlement les tentatives pathétiques d’Aileen de sortir de l’engrenage infernal. Et comme on ne se sort pas de cette horreur, les meurtres presque désespérés de six ou sept pauvres types qui voulaient se soulager vite fait et qui se retrouvent déchiquetés de balles.

2003_monster_004Fuite éperdue qui rassemble les deux amantes ; j’ai songé un instant à Mortelle randonnée, à Catherine (Isabelle Adjani) et Betty (Dominique Frot), au périple sanguinaire sur les routes du Midi ; mais non, ce n’est pas ça, parce que, dans le film de Claude Miller Catherine et Betty s’aiment vraiment. Alors que Selby est une sale petite chose peureuse et lâche qui va abandonner Aileen et témoignera même contre elle lors du procès où Aileen sera condamnée à mort.

Et exécutée, en 2002. Elle avait déclaré, au moment de son procès J’ai de la haine qui suinte de tous mes pores… (…) Je suis celle qui déteste le plus fortement la vie humaine et je tuerai de nouveau. Le film n’atteint pas tout à fait cette intensité, mais laisse pourtant un drôle de goût dans la bouche.

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