Panic room

Des chats et des souris.

Si je devais un jour, muni par le Bon Dieu d’une mission en ce sens, donner un conseil aux cinéastes de tous les pays, je me permettrais de leur en glisser deux, pour le même prix. Le premier serait : Hors rares exceptions, coupez toujours le dernier quart d’heure de vos films, quelle qu’en soit la durée. Et le second, bien plus impératif et contraignant, serait : Ne vous contentez pas d’une situation de départ originale et bien fichue : vous y tournerez vite en rond, vous devrez étirer votre rythme, inclure dans votre propos des éléments parasites et vous décevrez le spectateur avec la fin de votre film ! (Ce qui, au demeurant, rejoint tout à fait l’esprit de mon premier précepte et en confirme la pertinence).

Je ne me fais aucune illusion sur l’influence que je pourrais avoir sur les auteurs ; n’empêche que Panic room confirme, et au delà !, ce que je viens d’écrire. Voilà un réalisateur, David Fincher, dont le talent de mise en scène n’est pas contestable et qui, comme c’est amplement démontré, possède même une réelle virtuosité et une grande élégance pour vous présenter un cadre, un décor, une situation. Voilà une bizarrerie intéressante (dont j’avoue n’avoir jamais entendu parler jusqu’à la vision du film), la chambre préservée, la pièce de sûreté, construite pour protéger de riches habitants contre les intrusions crapuleuses et dangereuses. Une distribution intelligente, dominée par Jodie Foster, dans le rôle de Meg Altman, dont la dureté de visage donne conscience de la détermination, de Kristen Stewart, sa fille Sarah, diabétique et Forest Whitaker, Burnham, le (un peu trop) brave type poussé par les duretés de la vie et les nécessités de la survie à devenir cambrioleur.

Seulement, lorsque les deux oiselles se sont enfermées solidement dans leur château-fort, à quoi doivent absolument accéder les cambrioleurs, qu’est-ce qu’on fait, d’autant qu’on n’en est sans doute qu’à la fin des premières trente minutes d’un film qui compte presque deux heures ? On va multiplier les fausses espérances, comme la tentative d’alerter un voisin somnolent par un jeu de lumières en langage Morse, on va introduire des éléments de suspense forts, comme la tentative d’asphyxie au gaz des deux femmes qui va se retourner contre ses instigateurs, on va ajouter tout ce qui, dans un film de suspense, sait maintenir l’attention du spectateur, comme ce téléphonage à Stephen Altman (Patrick Bauchau), mari séparé et père aimant de Meg et de Sarah, qui avorte après avoir presque réussi…

On renverse tant bien que mal la situation, en éliminant un des voyous, en bousculant les positions des chasseurs/chassés, en instillant une crise de tétanie grave chez la pauvre gamine. Mais il faut bien qu’on tire à la ligne ; un peu (la visite des deux policiers dont l’un flaire manifestement quelque chose), l’arrivée incongrue de l’ex-mari dans le bordel et sa rapide mise hors d’état de nuire. Tant à faire !

Mais la fin, c’est, comme on dit aujourd’hui à la télé, Du grand n’importe quoi et une sorte de folie à la Evil dead où les mourants surgissent toutes griffes dehors alors qu’on les pensait éliminés du paysage et se jettent rageusement sur les miraculés. Et la dernière séquence, irénique et melliflue où, les choses revenues dans leur ordre normal, les deux femmes bavardent dans ce qui doit être Central park est là pour donner à chacun bonne conscience.

On ne peut dire qu’on s’est ennuyé ; on ne peut pas dire que ça ne soit pas là du cinéma de consommation…

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