Peau d’âne

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Magie à l’état pur

Est-ce qu’on pourrait aujourd’hui tourner un film comme ça, une féerie singulière, bourrée de clins d’œil, de mélodies intemporelles, de vraies stars (j’entends par là des acteurs non formatés et proposés – ou imposés ? – par la télévision), de délicieux anachronismes, un film que l’on peut voir à tout âge (sauf, sans doute, l’adolescence, même prolongée, qui a besoin de plus de structure et qui a peur de se laisser avoir), qui émerveille les petits et rassasie les grands, qui fait retrouver aux vieux leur part d’enfance et donne aux enfants quelques solides raisons de vieillir ?

Ce n’est sans doute pas la grâce absolue des Demoiselles de Rochefort, que Demy n’a jamais retrouvée par la suite, et il y a, je le conçois, quelques raisons de s’agacer devant la naïveté de certains ralentis, de certaines fausses bonnes idées (la rose qui parle), devant la présence de quelques ringardises (le bafouilleur Pierre Repp, dont on se demande avec quelque angoisse comment il a pu acquérir une telle notoriété dans les décennies Soixante et Soixante-Dix), devant des effets spéciaux bien embryonnaires, ou la maladresse des play-backs

p_F_medMais, ceci étant posé, que d’enchantement, que de réussites, et – à y réfléchir – que de détermination chez Demy pour avoir réuni, dans une même distribution, Catherine Deneuve, Micheline Presle, Delphine Seyrig (celle-ci infiniment plus troublante là que dans tous les Resnais ou Duras possibles) !

Même ma tête de Turc habituelle, Jean Marais  est, malgré un costume un peu – beaucoup ! – ridicule, plutôt moins mauvais que d’habitude (en revanche, le costume de l’autre roi, Fernand Ledoux, le père du Prince charmant, directement inspiré d’Alice au pays des merveilles, est une délicieuse trouvaille).

Je me suis passé ce film enchanté hier en fin d’après-midi juste avant d’aller affronter la Nouvelle-Zélande en quart de finale et pour me préparer à la guerre de tranchée que nous allions devoir mener : on voit bien par là que la magie est encore de ce monde : la preuve, c’est que nous avons gagné.

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