Police python 357

Petits meurtres entre amis.

1976, c’était l’époque où Yves Montand était au sommet de sa notoriété et de ses succès cinématographiques. Entre Z de Costa Gavras en 1969 et Garçon ! de Claude Sautet en 1983, il n’y a pas un grand réalisateur français (Philippe de BrocaJean-Pierre MelvilleJean-Paul RappeneauHenri Verneuil et même Jean-Luc Godard) qui n’ait fait appel à lui. 1976, c’était aussi la dernière fois que l’acteur et sa femme, Simone Signoret tournaient ensemble (et à vrai dire, ils l’ont assez peu fait depuis Les sorcières de Salem de Raymond Rouleau en 1957). Le metteur en scène, Alain Corneau tournait là son deuxième film et ce début était plutôt réussi, quoiqu’il soit tissé d’invraisemblances.

Mais Corneau, avec son scénariste Daniel Boulanger a élaboré une histoire intéressante et finalement assez bien fichue, dominée surtout par la relation singulière, à la fois vénéneuse et évidente qui unit l’amant entreteneur, le Commissaire divisionnaire Ganay (François Périer), sa maîtresse Sylvia Leopardi (Stefania Sandrelli) et Thérèse Ganay (Simone Signoret), richissime et impotente qui admet, couvre et protège la double vie de son mari.

Au milieu de ce trio – qui n’a rien d’invraisemblable, qui a même un certain fumet de réalité – l’inspecteur Marc Ferrot (Yves Montand) apparaît comme un personnage presque incongru, un cow-boy solitaire qui n’apprécie rien tant que de travailler en solo, de n’avoir que le minimum de contraintes administratives et qui n’est jamais aussi heureux que lorsqu’il utilise son revolver, un Colt de gros modèle, qu’il emploie d’ailleurs sans un vertueux discernement (à nos yeux patelins d’aujourd’hui). Il est assez constamment dupé, en tout cas manipulé, même s’il s’en sort finalement mieux que tous les autres (et ce n’est pas bien difficile, à dire vrai, puisque les autres protagonistes sont morts). La chose est particulièrement sensible au début du film, qui est, il faut le dire, au moment où il pose les cadres du théâtre, extrêmement clinquant, pompeux, emphatique et faux, d’autant qu’il est nourri d’assez médiocres dialogues.

Mais, ce qui n’est pas si fréquent, à mesure que le film progresse, il se bonifie, exception faite de la scène finale, sur un parking de supermarché, où des bandits ont attaqué un camion de transport de fonds où Ferro/Montand se comporte en superman souverain. Mais tout ce qui tourne autour de la traque de l’assassin de Sylvia/Sandrelli, le redoutable et remarquable jeu de dupes qui s’établit autour de fausses pistes, d’une sorte d’accumulation de bêtises, d’imprudences et d’erreurs autour de Ferrot est excellent. Et en premier lieu le mal que le malheureux se donne pour ne pas conduire l’enquête comme il faudrait qu’elle le soit, au grand désarroi de ses subordonnés Ménard (Mathieu Carrière) et Abadie (Vadim Glowna). Comment, au demeurant, pouvoir oublier le très joli coup du vitriol dont s’asperge lui-même Férot afin de se soustraire à la confrontation prévue avec les témoins qui ont repéré ici et là sa gênante présence aux côtés de Sylvia ? Très originale idée de scénario en tout cas.

Trop d’invraisemblances, néanmoins. Par exemple, après la mort de Sylvia, dès que l’enquête commence et qu’on réunit des informations sur la jeune femme, personne ne semble se préoccuper de l’appartement où elle vivait : qui l’a acheté ou l’a loué ? On pourrait sûrement remonter assez vite au Divisionnaire Ganay/Périer. Quant au dépiautage dévastateur de ce même appartement par Férot, qui y cherche – et y trouve – des tas d’indices, ça dépasse un peu le domaine du réalisme.

Ne boudons pas notre plaisir : les acteurs sont excellents, la musique (de Georges Delerue) bien efficace et la calme vacuité de la ville d’Orléans tout à fait adaptée à la médiocrité des situations…

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