Ratatouille

Hommage du Vice à la Vertu.

Je ne peux pas dire que, regardant le film aux côtés de ma petite-fille, qui aura bientôt 6 ans et demi, je n’ai pas un peu somnolé, conduit au sommeil par un trop bon dîner opportunément arrosé et conclu par un cognac de qualité. Le dessin animé, ce n’est tout de même plus trop de mon âge et si je puis encore m’émerveiller aux grands chefs-d’œuvre conçus par Walt Disney c’est bien davantage en me remémorant mes joies d’enfant qu’en m’enthousiasmant pour l’inventivité des péripéties et la qualité technique de l’animation. Il n’y a lieu ni de se réjouir de cette maturité (qu’on peut appeler aussi gâtisme), ni la déplorer ; après tout, il y a bien des décennies que je ne m’amuse plus à faire des coloriages et à jouer au ballon prisonnier et, pour encore un moment, j’espère, je ne retombe en enfance que lorsque ma grande petite-fille vient se coller dans mes bras pour me demander de regarder avec elle un film qu’elle aime… Comment un être normal pourrait-il résister à son sourire ?

Donc, entre deux légers sommes, voici Ratatouille. Une forme de dessin qui ne ressemble pas à ce que j’ai connu, ni même à ce que mes propres enfants ont connu. Il y a eu des progrès fulgurants depuis vingt ans dans ce domaine, c’est évident et une impression de réalisme accrue. est-ce mieux pour autant ? Je n’en suis pas si certain. La part du rêve s’estompe un peu avec ce réalisme là : tous les enfants intelligents savent bien que les contes de fées, si effrayants et merveilleux qu’ils sont ne sont, précisément que des contes et ne prétendent pas à donner une image réaliste de ce qui se passe dans le pays des songes. En d’autres termes, à trop vouloir interpénétrer le monde réel et celui de l’immense imaginaire, il y a des risques à ce que personne ne trouve son content. D’où le succès (mais je ne connais vraiment rien au sujet) des dessins animés à la structure plus sommaire et au propos moins ancré dans le quotidien, qui peuvent ainsi contenter davantage la rêverie.

Bon ; ayant dit cela, qui n’est pas bien exprimé et donc risque d’être incompréhensible, que penser de Ratatouille ? Qu’indépendamment du récit, un peu trop long, le film présente au moins deux qualités qui méritent d’être mises en premier plan : la notion de transmission ou, si l’on préfère, d‘héritage, qui s’applique au talent et à la destinée du jeune Alfredo Linguini, fils naturel du grand cuisinier Auguste Gusteau qui, in fine récupère évidemment contre les manigances des margoulins et des usurpateurs, la possession du grand établissement que dirigeait son père, mort de chagrin après la perte d’une de ses étoiles gastronomiques (au fait, on a dit que cela était inspiré de la destinée de Bernard Loiseau ; pour avoir bien très bien connu et aimé le grand cuisinier de Saulieu, je ne vois à ce rapprochement qu’un parti pris anecdotique assez choquant).

La deuxième qualité est un sympathique manifeste en faveur de la cuisine des produits, et de la guerre à toutes les perversions de la nourriture industrielle mondialisée, cosmopolite et métissée, un plaidoyer pour l’authenticité, la rigueur et la justesse, contre les junk foods et malbouffes installées en France par l’impérialisme étasunien des McDonalds et autres cochonneries à base de viande hachée emprise dans du pain, mais aussi par des poissons crus avec des algues improbables proposées par des Chinois qui se font passer pour Japonais.

Paris, même en dessin animé, est toujours aussi beau, surtout débarrassé des infernales pistes cyclables de Mme Hidalgo et les rats, tant qu’ils ne foisonnent pas dans les squares du fait de la politique de la même incapable, sont bien amusants…

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