Timbuktu

373884C’est quand qu’on va où ?

Il ne faudrait pas que la juste indignation que nous ressentons envers les Islamistes et la répulsion que nous devons éprouver pour leur folie sanglante nous entraîne dans un tel chemin d’empathie que nous puissions nous croire obligés de hausser Timbuktu au rang de chef-d’œuvre. Sept Césars raflés lors de la cérémonie de 2015, un nombre considérable de prix récoltés dans les festivals internationaux : on a l’impression que les Jurys se sont presque sentis obligés de donner à l’élève Abderrahmane Sissako la note maximale parce que le combat qu’il a mené est indiscutable.

Un peu de mesure ne fera pas de mal : Timbuktu est un excellent film, les acteurs, qui ne sont pas tous professionnels, jouent parfaitement juste, les images du nord du Mali, qui n’est pas encore tout à fait le désert sont d’une grande beauté et, heureusement, les terroristes sont présentés sans mouvements outrés d’indignation, dans la simple logique de leurs convictions : au spectateur ensuite de se faire son opinion et de prendre conscience que tant d’aberrations se passent à quelques milliers de kilomètres de l’Europe, dans un pays qui fut français, dans une ville qui fut une lumière de civilisation, de spiritualité et de beauté.

3332496965_5ee93bc85b_o-1024x685Sissako procède par petites touches de plus en plus glaçantes et implacables : l’arrivée à peu près paisible des Islamistes qui prennent peu à peu possession des comportements et des corps, interdisent pêle-mêle la musique, le football, le tabac, imposent à une population musulmane mais ouverte la charia, ensemble d’ukases de chameliers bédouins du 7ème siècle, pourchassent les amoureux, lapident ceux qui ne sont pas mariés…

Sans haine, ni gêne, mais avec une absolue et effroyable bonne conscience, ils condamnent à mort et exécutent Kidane (Ibrahim Ahmed), éleveur touareg qui a tué par accident son voisin pêcheur et qui vivait jusque là tranquille et pacifique avec sa femme Satima (Toulou Kiki) et sa gracieuse petite fille Taya (Layla Walet Mohamed).

timbuktu-2On ressent un malaise tout de même à ce moment-là : c’est bien beau que les gamins du village, jouent un simulacre sans ballon de football pour duper les terroristes ; c’est bien beau que les adolescents se réunissent en secret pour écouter de la musique interdite ; c’est magnifique que Satima vienne rejoindre Kidane à l’heure de son assassinat légal… Mais où est dans tout cela le germe, l’aube d’une résistance ? Soumission immémoriale à la force brute, complaisance envers une conception de l’Islam jugée plus pure que la sienne propre ? Toujours est-il que si les légionnaires du 2ème R.E.P. n’étaient pas venus délivrer la ville en janvier 2013… Mais est-ce que nous pouvons et nous devons nous substituer toujours à ceux qui devraient se défendre eux-mêmes ?

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