Un balcon sur la mer

On n’oublie rien.

Drôle de film, au scénario qui paraît d’abord bien simple, puis extrêmement compliqué et où tout s’éclaire à la fin dans une conclusion plutôt larmoyante. Le genre de trucs que je n’apprécie pas beaucoup, du type Ne le dis à personne de Guillaume Canet : des secrets de famille, des fausses pistes, des personnages à faces trop multiples, des souvenirs du passé qui reviennent et embrasent la tête d’un homme jugé par tous sans défauts et dont la vie paisible va être détricotée. Un peu bizarrement, pour des raisons qui ne s’expliqueront que furtivement et bien tard, Un balcon sur la mer se situe en 1989 ou 1990, puisque la radio évoque le nom de Michel Rocard, alors Premier ministre et diffuse le délicieux tube C’est la ouate de Caroline Loeb.

Ça commence plutôt bien, disais-je : Marc Palestro (Jean Dujardin) est marié calmement avec Clotilde (Sandrine Kiberlain). Il est le père d’Emmanuelle (Pauline Bélier) et le gendre de Robert Prat (Michel Aumont), patron d’une prospère agence immobilière d’Aix-en-Provence, dont il est naturellement le bras droit. L’agence est plutôt spécialisée dans l’immobilier de luxe, la vente de bastides, d’hôtels particuliers, de beaux domaines. Un associé, Sergio Bartolli (Toni Servillo) apporte des affaires et des clients d’Italie. Tout va bien.

Tout va bien jusque, à l’occasion d’une énième transaction immobilière, Marc flashe sur la négociatrice de l’acheteur, Marie-Jeanne Mandonato (Marie-Josée Croze) ; d’autant qu’il croit reconnaître en elle son amour d’enfance, Kathy, qu’il a perdue de vue depuis leur rapatriement d’Algérie, au printemps 1962, et dont la nostalgie l’envahit jusqu’à l’obsession. Il la regarde, la désire, la traque, il couche avec elle, mais la femme fuit, ne donne sur elle aucun renseignement. Et lors de la signature du contrat de vente, alors qu’ils sont convenus de se retrouver à l’hôtel, elle est introuvable.

C’est à ce moment-là que le film commence à s’envoler n’importe où, à partir dans les flash-backs de l’heureuse enfance d’Algérie, de la nostalgie de l’enfance et de ce moment miraculeux où les enfants pré-pubères commencent à ressentir les uns pour les autres des émois qui ne sont ni ridicules, ni sales. Mais au fait, qui est Marie-Jeanne ? Marc croit qu’elle est Kathy et s’éblouit dans un souvenir enfantin et infantile de cet amour de tête qu’il a nourri mais qui n’a eu, en fait, aucune importance dans sa vraie vie.

Ce n’est donc pas sa vraie vie, celle avec sa femme et sa fille, qu’il va vivre ; mais une sorte de fantasmagorie qui le renvoie vingt-cinq ans en arrière. Son couple ronronne ? autant, alors s’enfoncer dans les mystères de la mémoire et tenter de renouer une vie qui aurait pu être. Mais qui n’a pas été.

L’embêtant du film, c’est qu’on y voit une sorte de tristesse bébête, niaise, sans souffle. Il y a une petite fille, Marie-Jeanne/Croze, qui, de tout temps a été amoureuse de Marc/Dujardin, qui ne la regardait pas, tout émerveillé par Kathy, la meilleure amie de la petite fille et qui ne s’est jamais résignée à n’être qu’une silhouette.

Mais là, c’est trop : le film a quitté ses rails et dérive dans les parages du romanesque niais. Et il finira dans ses filets.

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