Archive for janvier, 2018

La nuit du loup-garou

mardi, janvier 30th, 2018

Le loup, meilleur ami de l’homme.

En étant un peu sommaire, on pourrait classer les horreurs qui surgissent des films d’épouvante en deux catégories : celles qui ont, d’une façon ou d’une autre, été si fascinées par le Prince des Ténèbres qu’elles lui ont voué un culte, lui ont donné leur allégeance et sont devenues les séides de Satan en adhérant avec enthousiasme à son Évangile ; et, d’autre part celles qui, par malchance ou fatalité, sont en quelque sorte contraintes à massacrer parce qu’il ne leur est pas possible d’échapper à leur noire destinée. Parmi les premières figurent toutes les variétés satanistes, adoratrices du Malin, représentantes de sa puissance sur terre, par exemple les sectateurs de La Malédiction et, au sommet du romanesque, les vampires (tout au moins tant que l’on a confiné Dracula à sa place maléfique). Les secondes sont des malheureuses victimes à peu près innocentes d’une péripétie dramatique dont elles ne sont pas responsables, jouets de forces qui les dépassent. Par exemple les zombies ou la créature de Frankenstein. (suite…)

Nocturama

lundi, janvier 29th, 2018

Et on tuera tous les affreux…

Une dizaine de garçons et de filles (deux filles, en fait seulement), un peu plus ou un peu moins de vingt ans, venus de milieux sociaux évidemment très différents et d’origines ethniques diverses (euphémisme pour dire qu’il y a des Français de souche et d’autres issus de l’émigration) ravagent Paris dans le même instant : quatre attentats terroristes, l’assassinat d’un grand patron. Ils se retrouvent, la nuit venue, dans l’immensité d’un grand magasin. Ils attendent le matin. Ils sont repérés, abattus sans aucune pitié par les forces spéciales. Le film a été tourné à l’été 2015, c’est-à-dire quelques mois après les tueries de Charlie-Hebdo et de L’hyper casher, mais avant les massacres du Bataclan et des rues adjacentes. Y a-t-il un rapport ? Non ! Le film a été écrit en 2011 et ne fait naturellement pas référence à une revendication islamique. (suite…)

Au royaume des cieux

samedi, janvier 27th, 2018

Dortoir des grandes.

Dans la longue, étincelante, passionnante filmographie de Julien Duvivier, ce film n’apparaît pas comme une étoile majeure, de première magnitude, un chef-d’œuvre comme La belle équipeLa fin du jour ou Voici le temps des assassins, mais comme quelque chose d’extrêmement intéressant et atypique.

Le film se situe dans le cadre presque carcéral d’une maison de redressement pour jeunes filles, dont le régime pénitentiaire, au lendemain de la guerre, est incroyablement plus dur qu’on pourrait l’imaginer. (suite…)

Showgirls

mercredi, janvier 24th, 2018

Mets deux tunes dans l’bastringue.

Je ne peux pas dire avoir vu la totalité de la notable filmographie de Paul Verhoeven, loin de là, mais je ne crois pas qu’on puisse rester tout à fait indifférent à un cinéaste grand ennemi du politiquement correct, qui distille toujours une goutte d’étrangeté acide dans ce qu’il réalise. Et ceci quel que soit le genre cinématographique de ce qu’il filme et qui est assez varié pour mettre la puce à l’oreille de qui ne le connaîtrait pas (il est vrai qu’à mes yeux la variété des histoires filmées, quand elle va avec la permanence du regard d’auteur porté sur elles est souvent un gage de talent ou davantage : voir l’œuvre de Stanley Kubrick, si besoin est). Et Verhoeven parcourt une large palette : érotisme sulfureux de Turkish délices, fresque historique de La chair et le sang, science-fiction (RobocopStarship troopers), fantastique (Hollow man), thriller vénéneux (Basic instinct), récit de guerre (Black book), exploration psychologique (Elle)… (suite…)

Plus dure sera la chute

mardi, janvier 23rd, 2018

Juste un coup à prendre !

Dans le riche sous-genre des films qui mettent en scène la boxe professionnelle, sous-genre qui compte, d’ailleurs, quelques réussites artistiques incontestables (Gentleman JimNous avons gagné ce soirLe baiser du tueur, les premiers RockyRaging bull et même, d’une certaine façon Million dollar baby), voilà que Plus dure sera la chute survient comme la dénonciation la plus vive, la plus convaincante, la plus violente de cette activité barbare, dont les amateurs vous racontent qu’elle est l’escrime des poings mais qui est en réalité l’hypocrite descendance des pires combats de gladiateurs de l’Antiquité. Si la vision des boxeurs en action est toujours pathétique, celle des yeux exorbités et des cris orgasmiques des spectateurs est un des aperçus les plus glaçants qui se puissent sur la nature humaine. (suite…)

La femme du boulanger

vendredi, janvier 19th, 2018

La vie quotidienne, tragique et ridicule.

D’un bref récit extrait de Jean le bleu sorte d’autobiographie romancée de la jeunesse, de Jean Giono, voilà que Marcel Pagnol fait un film saisissant, admirable quoiqu’imparfait. Un film un peu long, une intrigue assez mince, la prédominance qu’on peut juger excessive du rôle d’Amiable Castanier, boulanger cocu (Raimu) sur tous les autres, parallèlement l’effacement presque complet d’Aurélie, femme adultère (Ginette Leclerc), l’aspect encore un peu théâtral du village où il suffit d’un rien pour que, comme entre cour et jardin, tous les habitants, petits et grands, se concentrent et se réunissent comme s’ils avaient rien d’autre à faire que de guetter l’événement. Et si l’on veut aussi l’aspect presque magique et un peu larmoyant du retour à la maison de la femme infidèle qui paraît bien convaincue qu’elle ne recommencera pas ses escapades alors que tout indique qu’il est dans sa nature même d’aller voir la feuille à l’envers avec le premier venu qui passera dans un mois, dans un an. (suite…)

Solal

jeudi, janvier 18th, 2018

Prolégomènes

Albert Cohen publie Solal en 1930. C’est son premier roman, immédiatement remarqué et salué par la Critique. Et pourtant ce n’est encore, à mes yeux, qu’une esquisse, qu’une ébauche de ce qui va venir plus tard avec Mangeclous (1938) et naturellement Belle du Seigneur (1968) et Les Valeureux (1969).

Esquisse et ébauche ne sont d’ailleurs pas les mots justes : c’est plutôt préfiguration qu’il faudrait écrire. Et dans le domaine littéraire , je ne vois guère qu’un seul exemple à rapprocher de Solal et de ses développements, et encore n’est-ce pas tout à fait similaire.

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Une femme en blanc se révolte

mardi, janvier 16th, 2018

 

Le diable qui veut se faire ermite.

On demeure rêveur, tout de même : qu’est-ce qui a pu conduire Claude Autant-Lara, un des cinéastes français les plus talentueux, mais sûrement aussi le plus destructeur, le plus méchant, le réalisateur grinçant, féroce de Douce, de L’auberge rouge, de La traversée de Paris à filmer une pouillerie pareille ?? C’est tout dire, on croirait voir un de ces affreux films d’André Cayatte, un de ces films à thèse tout dégoûtants de crème indignée à la Stéphane Hessel, où une voix supérieure tonne du haut de sa chaire pour faire passer des idées censées réunir par leur noblesse affectée tous les spectateurs, y compris (et surtout) ceux dont le cœur est le plus endurci. Et, par dessus le marché de faire progresser la Société vers l’avenir radieux où elle éliminera vertueusement les pires entraves d’un passé forcément abominable…

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Ma vie avec Liberace

dimanche, janvier 14th, 2018

Des mauvais goûts et des couleurs.

Étrange film de Steven Soderbergh (en fait c’est un téléfilm tourné pour la chaîne HBO), étrange film sur un personnage bien plus étrange encore : Wladzu Valentino Liberace, né en 1919 d’un père napolitain et d’une mère polonaise pauvres et mort du sida en 1987, multimillionnaire. Il est certain que, sauf à être particulièrement passionné par le show-biz nord-américain on n’aurait jamais entendu parler de ce pianiste fantaisiste virtuose avant la sélection au festival de Cannes de 2013 de Ma vie avec Liberace. (suite…)

Le spectre du chat

jeudi, janvier 11th, 2018

L’oeil était dans la tombe.

Je n’irai pas jusqu’à dire que ce film de série de la célèbre Hammer (qui, pour des raisons juridiques conjoncturelles n’est pas créditée au générique, comme expliqué dans un supplément du Dvd), je n’irai pas jusqu’à dire que ce bon spectacle de cinéma de quartier hantera mes nuits d’angoisse. Non, tout de même : c’est un peu fauché, l’intrigue est terriblement téléphonée et, sauf à être totalement ignorant de la grammaire élémentaire du film fantastique, les péripéties sont absolument prévisibles. Malgré une dernière image un tout petit peu ambiguë, la fin du film est extrêmement morale et d’un classicisme éprouvé : le mariage des deux personnages positifs, Elizabeth Venable (Barbara Shelley) et Michael Latimer (Conrad Phillips). (suite…)