Archive for octobre, 2018

Douze hommes en colère

mardi, octobre 16th, 2018

Mea maxima culpa.

J’aurais bien aimé être de l’avis de tout le monde et porter aux nues Douze hommes en colère, célébrés sur tous les tons, acclamés par la critique et le public. Trois Oscars, l‘Ours d’or de Berlin, une réputation de film à la fois passionnant, tendu, intelligent et humaniste. Et puis Henry Fonda à un de ses (multiples) sommets, la chère vieille sale gueule de Lee J. Cobb et celle, à peine moins notoire de Martin Balsam, le détective de Psychose. Certes, si tout le film avait été tourné avec des acteurs que je connaissais et reconnaissais (comme dans Marie-Octobre, par exemple), je me serais senti plus à l’aise, mais je ne peux pas imputer à un film étasunien de la fin des années 50 mes insuffisances sur 9 des tronches présentées. (suite…)

Jeunes filles en uniforme

vendredi, octobre 12th, 2018

Troubles en eau profonde.

Une pièce de théâtre d’une certaine Christa Winsloe, hongroise, lesbienne, assassinée pour espionnage d’une façon assez trouble et mystérieuse par des résistants en 1944 a donné lieu à trois adaptations au cinéma, sans doute parce que le climat étouffant et équivoque d’un pensionnat rigide de jeunes filles dans la Prusse militariste de 1910 excitait des tas de fantasmes. Première version en 1931 de Leontine Sagan, avec des actrices inconnues (Hertha ThieleDorothea WieckEmilia Unda). Dernière version en date, de Katherine Brooks, sous le titre de Loving Annabelle qui est une sorte (d’après ce que j’ai lu) de pamphlet homosexualiste où les ambiguïtés et les non-dits des premiers films sont explicitement montrés.

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Cet obscur objet du désir

jeudi, octobre 11th, 2018

Trop belle(s) pour toi.

Le dernier film de Luis Bunuel, qui ne mourra pourtant que six ans plus tard, récapitule les habituelles frustrations et les habituels fantasmes hispaniques du réalisateur, tellement bien symbolisés par cette sorte de corset/ceinture de chasteté que porte la belle Conchita pour à la fois exciter et éteindre le désir de Mathieu (Fernando Rey), cet homme qu’elle ne cesse d’attiser et de glacer presque dans le même instant et se dérobant toujours, prenant d’ailleurs deux visages différents (Carole Bouquet/Angela Molina). (suite…)

Le café du cadran

mercredi, octobre 10th, 2018

Plus que l’air parisien, la douceur auvergnate.

C’est amusant comme ce film tourné en 1947 aurait pu l’être cinq ans auparavant, tant il est porteur d’orientations qu’on pourrait presque qualifier de vichystes : le détournement, par les lueurs brillantes et détestables de la grande ville d’un gentil couple provincial qui aurait mieux fait de demeurer dans le Puy-de-Dôme ou le Cantal où il aurait vécu, heureux et un peu terne, le reste de son âge. C’est qu’en fait, à nos yeux modernes, Travail, Famille, Patrie est un slogan pétainiste (et tout près de l’hitlérisme), alors que, pour les braves spectateurs du lendemain de la guerre, c’est une évidence de comportement : on devrait plus souvent lire les vertueuses pages de L’Humanité de l’époque et se rappeler que Jeannette Vermeersch, femme du leader incontesté et rayonnant du P.C.F., Maurice Thorez, était tout sauf féministe et progressiste. (suite…)

Mourir à 30 ans

jeudi, octobre 4th, 2018

La nostalgie, Camarades !

Voilà un film – un documentaire aux images souvent pâlies et incertaines, empli d’interventions qui paraîtront absconses ou incompréhensibles à la plupart – un film dont je me suis régalé et qui m’a souvent ému et que je ne pourrai conseiller à personne, ou presque, ce qui me navre. Mais pour regarder et apprécier Mourir à trente ans il faut avoir, d’abord vécu ces années qui sont décrites – en gros 1966/1973 – ce qui n’est pas encore tout à fait rare, mais surtout avoir vécu dans son cœur et dans toutes ses journées cette vie de militantisme intégral. (suite…)

Germinal

mercredi, octobre 3rd, 2018

Haveurs, herscheuses et galibots.

Le plus puissant des romans du cycle des Rougon-Macquart n’est assurément pas très facile à porter à l’écran. Et cela au contraire des autres récits de Zola qui demandent moins de décors, moins de comédiens, moins de machineries et dont les intrigues sont plus linéaires.

Ainsi Gervaise (L’Assommoir), Nana, Au bonheur des damesPot-Bouille. Pour Germinal, il faut vraiment du souffle et presque de l’emphase, parce qu’au delà de l’histoire d’Étienne Lantier (ici Renaud) et de la famille Maheu, c’est celui de la mine dévorante et des masses éternelles. (suite…)