Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Le chômeur de Clochemerle

mercredi, mars 20th, 2019

Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie.

Placer sous l’invocation de Blaise Pascal un film de l’ordre du Chômeur de Clochemerle peut paraître assez singulier et même tout à fait démesuré. Mais s’il est vrai que ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, selon la formule hermétique d’Hermès Trismégiste et que – revenons à Pascal – les deux abîmes de l’infini et du néant se répondent en parallèle, le titre que je donne à ce message n’est pas du tout illégitime. Car la vacuité au cinéma a quelque chose de fascinant. C’est certes moins admirable que les trop rares chefs-d’œuvre et beaucoup plus fréquent, mais c’est tout autant sidérant. (suite…)

Voyage à travers le cinéma français 2

lundi, mars 18th, 2019

Tavernier l’enchanteur.

Voyage à travers le cinéma français était un film sorti en salles (trop peu de salles) en 2016, un film emballant, enthousiasmant, nourri de l’amour du cinéma de Bertrand Tavernier et destiné à ceux qui, comme lui, aiment voir et revoir les films qu’ils apprécient, chefs-d’œuvre incontestés mais aussi petits bijoux peu connus, quelquefois en toc, souvent magnifiques. Mais au bout des 3h15 partagées par un entracte, on sortait frustré de la salle. Jacques BeckerJean RenoirJean VigoMarcel CarnéJean-Pierre Melville affectueusement, amoureusement présentés, c’était évidemment magnifique, mais où étaient les autres, Sacha GuitryJean GrémillonMarcel PagnolJulien DuvivierMax Ophuls ? Et un carton, heureusement, annonçait un deuxième film.

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Les secrets professionnels du docteur Apfelglück

dimanche, mars 17th, 2019

Petites horreurs minuscules.

Est-ce que Les secrets professionnels du docteur Apfelglück n’est pas, d’une certaine façon la conclusion et le chant du cygne de toute une période du cinéma comique français irrigué par les équipes mélangées d‘Hara-Kiri (et de Charlie Hebdo), du Café de la Gare et du Splendid, qui portaient une veine de dérision, de sarcasme, d’outrance et qui ont donné leurs plus éclatantes comédies dans les quinze ans qui ont précédé le film à sketches multi-réalisé par Alessandro CaponeStéphane ClavierHervé PaludMathias Ledoux et Thierry Lhermitte ? À partir de Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine de Coluche (1977) et surtout des merveilleux Bronzés (1978), c’est une suite de contes et récits déjantés. Il faut toutefois bien reconnaître que la plupart manquent totalement de qualité, que ce soient Les héros n’ont pas froid aux oreilles (1979), Elle voit des nains partout (1982), ou Les cigognes n’en font qu’à leur tête (1989). Et je ne cite que ce dont je me souviens. (suite…)

Vive les femmes !

mercredi, mars 13th, 2019

En ces temps-là…

Jean-Marc Reiser est mort, à 42 ans, en 1983 (déjà). S’il avait vécu, aurait-il fait partie des victimes de l’attentat islamiste du 7 janvier 2015 où Georges Wolinski, un de ses amis de la grande époque de Charlie Hebdo fut assassiné ? Ou bien se serait-il un peu éloigné doucement de cette équipe iconoclaste, comme l’avait fait François Cavanna, mort en 2014 ? Va savoir ! Il y a toute une équipe ravageuse qui a disparu au fil des ans, avec les vicissitudes de l’âge, comme Marcel Gotlib, équipe qui avait, comme jadis les surréalistes, révolutionné les regards sur la vie. (suite…)

La dixième victime

samedi, mars 9th, 2019

Annales du futur.

Je partage évidemment l’opinion de tous ceux qui s’agacent de voir un film parti sur d’assez bonnes bases s’essouffler presque tout de suite et ahaner pendant 90 minutes à la recherche d’une véritable inspiration et surtout d’un véritable rythme. Car il y avait d’excellentes bases à développer sur cette société future où les vieux, qui sont des charges économiques lourdes, sont euthanasiés, où on peut naître par fécondation artificielle avec la contrepartie effarante qu’on est alors dépourvu de sensualité, où, surtout, afin d’éviter que les instincts meurtriers de l’Humanité s’épanouissent dans des guerres sanglantes, on a institutionnalisé la chasse à l’homme. Mais au contraire des Chasses du comte Zaroff où cette traque est transgression et remède à l’ennui (comme dans Un roi sans divertissement), la chasse de La dixième victime est célébrée et récompensée par la société. (suite…)

Chronique d’un été

jeudi, mars 7th, 2019

Comme le temps passe…

On ne peut pas dire, loin de là, que le film soit ennuyeux. Ou, du moins, qu’il m’ait ennuyé. Et pourtant, j’aurais beaucoup de scrupules à en conseiller, ou même à en suggérer la vision, tant cette chronique, qui n’est pas si longue que ça (moins de 90 minutes) peut surprendre, décontenancer et ne paraît pas avoir le moindre rapport avec ce qu’il est convenu d’appeler le cinéma. Et ceci moins pour les techniques de cinéma-vérité (acteurs non professionnels, images captées dans la rue, son direct) que pour les questions et les débats filmés par Jean Rouch sous l’œil vigilant d’Edgar Morin, qui nous ramènent aux antédiluviennes années 60, celles des questions existentielles, de l’engagement politique et – si l’on peut dire – du sens de la vie.

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L’école buissonnière

jeudi, mars 7th, 2019

« Il va vers le soleil levant, notre pays ! »

J’aime beaucoup les films du Parti Communiste Français, dont la plupart sont nimbés d’une espérance presque eschatologique et d’un optimisme très lendemains-qui-chantent. Je parle évidemment de la grande époque du PCF, celle où il s’était constitué en Contre-Église et cherchait à rassembler dans les cellules toutes les classes sociales et intellectuelles et y parvenait presque. Et non, bien sûr, du dégoûtant partipicule d’aujourd’hui qui s’appuie sur une collection de minorités communautaristes. Mais sinon ! La vie est à nous de Jean Renoir (1936), Le temps des cerises de Jean-Paul Le Chanois déjà (1938), avant-guerre. Puis Le rendez-vous des quais de Paul Carpita (1953), La terre fleurira d’Henri Aisner (1954), Les copains du dimanche du même (1956), Premier mai de Luis Saslavsky (1958). Et la nostalgie brûlante de cette époque, après la décadence dans Rouge baiser de Véra Belmont (1985) et Tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents communistes de Jean-Jacques Zilbermann (1993)… (suite…)

Kill Bill – volume 2

mardi, mars 5th, 2019

Le grand méchant loup

J’ai lu quelque part que, dans l’esprit de Quentin Tarantino, il ne s’agissait pas primitivement de concevoir deux films et que tout aurait dû être d’un seul tenant. Mais au regard de la complexité de l’histoire la durée présumée a dû effaroucher les producteurs. D’où le parti de diviser en deux le récit. D’où, sans doute aussi, la volonté du réalisateur de varier les orientations cinématographiques tout en employant exactement les mêmes matériaux scénaristiques. En d’autres termes d’utiliser pour le second opus la veine du western spaghetti après avoir largement usé de celle du chambara nippon dans le premier. Je ne m’en plains pas, ayant bien davantage de goût pour la première que pour la seconde et y trouvant notamment bien plus de richesses potentielles. Et cela même si je reconnais volontiers que les chorégraphies orientales, avec les sabres ou les poings et les pieds sont très spectaculaires, tout au moins quand elles ne dépassent pas cinq minutes ; car ce ne sont que des chorégraphies. (suite…)

Kill Bill volume 1

mardi, mars 5th, 2019

Les petites filles modèles.

Comme, grâce à Reservoir dogs et Django unchained je suis, depuis quelques années, un peu revenu de mes préventions contre Quentin Tarantino, sans jamais le placer, bien sûr, au sommet de mon Panthéon cinématographique, je me suis dit qu’il pouvait être instructif d’aller redécouvrir les deux Kill Bill. J’avais, il y a beau temps, regardé assez distraitement le premier, vite agacé par une violence si chorégraphiée que, malgré sa sauvagerie, elle n’est absolument pas terrifiante et que son esthétisme athlétique la fait volontairement décoller de toute réalité. Je ne suis pas, pas du tout allergique aux massacres, que ce soit ceux de Cannibal holocaust ou ceux d’Hostel, mais, dans le genre, j’estime que le minimum est de filer les chocottes au spectateur. Ce qui n’est pas le cas dans le film de Tarantino, tout au moins dans Kill Bill volume 1. (suite…)

La cérémonie

samedi, mars 2nd, 2019

Infernales.

Je suis assez surpris qu’on puisse considérer La cérémonie comme une nouvelle charge contre la bourgeoisie de province, que Claude Chabrol n’a cessé toute sa carrière de vilipender. On peut bien faire des yeux ronds et faire mine de s’étonner que la bonne à tout faire Sophie (Sandrine Bonnaire) couche dans une chambre de bonne, qui n’est évidemment pas la chambre des maîtres et qu’elle effectue le travail pour quoi elle est payée. On peut bien jouer à l’exégèse marxisante et gloser à l’envi sur le thème de la vengeance de classe infligée aux patrons par les prolétaires humiliés. mais en fin de compte, le sujet du film, c’est bien l’assassinat d’une famille harmonieuse et intelligente perpétré par deux cinglées.

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