Ibiza

Soporifique.

Je gage que France 2 a encore davantage ressenti, les derniers temps, le complexe d’infériorité que la télévision dite de service public (tu parles !) nourrit envers sa plus riche concurrente, fleuron du groupe Bouygues et du capitalisme décérébrant. TF1 programmant régulièrement, les dimanches soirs, les plus épouvantables succès de la bêtise franchouillarde et se taillant la part du lion avec les pitreries de Franck Dubosc et de ses épigones, la deuxième chaîne, en une manœuvre d’une audace inouïe, a mis habilement en place, hier soir, un film du même genre.

Ça s’appelle Ibiza, ce qui est un bon produit d’appel (y’a du soleil et des nanas !) et c’est réalisé (si l’on peut dire) par un certain Arnaud Lemort, dont je découvre qu’il a écrit des sketches pour des émissions rigolardes de Laurent Ruquier et qu’il a mis en scène trois films en dix ans, celui-ci étant le dernier en date. Comme ce n’est certainement pas le renom du cinéaste qui aurait pu faire courir les foules (d’ailleurs, y a-t-il aujourd’hui un réalisateur qui puisse accomplir ce genre de miracles ?), la production a employé des armes lourdes : Christian Clavier, qui prostitue depuis vingt ans un talent qui fut réel et Mathilde Seigner qui suit à peu près la même spirale. Et puis un type qui connaît à mes yeux, un succès invraisemblable auprès du public vieillissant ravi et inquiété tout à la fois par son allure bestiale, JoeyStarr qui a, je pense, depuis longtemps, cessé de niquer sa mère, charmant gazouillis qui l’a fait connaître. Avec Olivier Marchal en cadeau bonus, voilà la distribution bouclée.

Donc Philippe et Carole (Clavier et Seigner) sont l’un et l’autre divorcés et depuis peu ensemble ; il est primordial que Philippe puisse sinon séduire, du moins se faire accepter des deux enfants de Carole, Julien (Leopold Buchsbaum) et Manon (Pili Groyne), adolescents aussi nuls qu’insupportables. Pour amadouer Julien, Philippe lui promet, si le gamin a son bac (92% de succès, en général !) que c’est lui qui choisira le lieu des vacances communes. Julien choisit Ibiza, bien lointaine et bien différente du Crotoy, dans la baie de Somme où Philippe a ses habitudes.

Débarquement de la petite troupe aux Baléares.

On devine ce qui s’ensuit. Enfin… quand je dis ça, je m’avance, puisque je me suis endormi avant la moitié du film, au moment où Carole retrouvait ce qui m’a paru être une vieille connaissance, Frankie (JoeyStarr) qui est naturellement, évidemment, spectaculairement un des rois de la fête. Je me suis réveillé cinq minutes avant la fin et j’ai cru comprendre que ça se terminait bien ; quelle surprise !!

J’ai été ravi de constater que, en regard de la distribution et des moyens mobilisés, le film avait été un bide monumental (à peine plus de 630.000 entrées) ; mais, on le sait, l’organisation du cinéma français est une sorte de poule aux œufs d’or qui distribue avances sur recettes et crédits avec profusion. Remarquez, ça permet de maintenir sur le territoire un bout d’industrie et quelques centaines de techniciens et d’intermittents du spectacle qui devraient avoir le bon goût de ne pas se plaindre des Pouvoirs publics.

 

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