Mystic river

5433Dans un monde cruel.

Je suis assez surpris du concert de louanges élevé pour Mystic river, dans quoi beaucoup d’amateurs de qualité voient une œuvre majeure et qui m’a semblé bien touffu et torturé, tout nourri des complexités romanesques des auteurs de polars étasuniens (pour ce que j’en connais qui, je l’admets volontiers, n’est pas grand chose). Un puzzle qui s’assemble graduellement, des tensions qui se font jour, la révélation de caractères, de situations, de secrets, de non-dits : vous secouez au shaker et hop ! passez muscade…

Article_6_photo_1J’ai conscience d’exagérer un peu. J’ai pris de l’intérêt aux aventures à la fois parallèles et divergentes (nouvelle notion mathématique dont je ne suis pas peu fier) de ces trois gamins de Brooklyn qui, vingt ans après le rapt et le viol immonde de l’un d’entre eux, se retrouvent miraculeusement assemblés par l’assassinat de la fille d’un autre. C’est bien fichu, les acteurs sont parfaits, les sites urbains (Boston, je crois) absolument sans caractère, les policiers ont la bouche amère qui sied à leur rude métier (et arrivent, le revolver en main, exactement au moment où il faut qu’ils arrivent), les femmes sont utilitaires et dévastées et les remugles du passé sont atrocement puants.

Même si la révélation finale de l’identité des assassins de la jolie Katie (Emmy Rossum) arrive comme un cheveu sur la soupe et apparaît bien plate, au contraire de ce qu’on espérait de troublantes surprises, c’est bien mené, sur un rythme un peu plon-plon, sans beaucoup de souffle, mais sans ennui.

mr2Ça va de soi, tout le monde est malheureux, tout le monde porte de lourdes saletés, des frustrations majuscules, des désolations accablantes : aucun des trois garçons qui jouaient au hockey avec insouciance au tout début du film n’a une vie légère. Dave Boyle (Tim Robbins) parce que, violé, esquinté, abîmé dès l’origine, il est déjà mort dans la cave où ses profanateurs l’ont confiné. Jimmy Markum (Sean Penn) parce que la seule femme de sa vie est morte d’un cancer alors même qu’il était emprisonné et que, depuis lors, il ne fait que survivre avec son substitut, Annabeth (Laura Linney). Sean (Kevin Bacon) parce que sa femme l’a quitté sans qu’il comprenne pourquoi et qu’il erre depuis lors comme un mouton lourd dans un monde cruel (rapprochement à faire avec L’Œil (Michel Serrault) de Mortelle randonnée). Tout le monde est malheureux, mais tout va s’arranger à la fin : Dave est mort et désormais tranquille, Jimmy va redevenir le gangster qu’il aurait pu ne pas être et Sean l’agent du FBI qu’il rêvait de devenir.

Voilà qui se laisse regarder, mais qui passera comme un zéphyr…

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