Les enfants nous regardent

mars 11th, 2022

L’enfance nue.

Ce qui est le plus réussi du film, c’est évidemment la faculté de Vittorio De Sica de faire considérer une histoire mélodramatique plutôt banale et même larmoyante avec les yeux d’un enfant absolument perdu et désarmé par les jeux cruels et les hypocrisies des adultes. Le petit garçon Pricò (Luciano De Ambrosis) est pendant toute la durée du film ballotté entre ceux qui l’aiment – son père Andrea (Emilio Cigoli) et sa mère Nina (Isa Pola) -, celles qui devraient l’aimer – sa grand-mère (Jone Frigerio), sa tante (Dina Perbellini) -, celui qu’il gêne et embarrasse, Roberto, l’amant de sa mère (Adriano Rimoldi). Read the rest of this entry »

Nous les gosses

mars 7th, 2022

Les temps raisonnables.

Je ne crois pas qu’il existe aujourd’hui des films de gosses, des films où soient mis en avant le monde merveilleux de l’enfance ou de la toute première adolescence, celle où l’avenir s’écrit encore en forme d’aventures fabuleuses. Celle où le monde est plein d’incertitudes où le courage, la détermination, la franchise, l’honnêteté, le dévouement, la générosité ne se sont pas encore mis à plier bagage devant la médiocrité des réalités. Qu’est-ce qui me vient à l’esprit, spontanément ? Read the rest of this entry »

La comtesse

mars 6th, 2022

Sado et Maso sont dans un bateau.

Les prurits du féminisme agressif faisaient déjà florès il y a plus de dix ans. Dès alors la mode obstinée voulait mettre en valeur le sort malheureux des femmes vouées moins par l’agressivité ordinaire des hommes que par le regard structurellement méprisant de la Société aux pires gémonies. Car si Erszébeth Bathory se repaît du sang des vierges, c’est moins parce qu’elle croit qu’ainsi elle pourra demeurer jeune que parce qu’elle répondra ainsi au désir – forcément déplaisant, forcément scandaleux – des hommes. Des hommes qui – ô scandale affreux et pitoyable – ont davantage de désir pour la chair fraîche que pour la peau plissée.

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Le hasard

mars 5th, 2022

Le battement d’aile d’un papillon.

Exercice de style habile, jeu intellectuel séduisant qui consiste à imaginer des orientations finales extrêmement différentes selon que, à la suite d’un hasard infime, la vie d’un personnage prend un tour inattendu. Voilà ce qu’est le film de Krzysztof Kieslowski qui m’a d’abord ennuyé, puis agacé mais qui a fini par m’intéresser grâce à une intelligence profonde des situations et au regard cohérent posé sur le déroulement des histoires. Et sans doute aussi à la méditation qu’il impose sur l’existence de chacun : si, certain jour de ma vie, j’avais tourné à droite plutôt qu’à gauche, ma vie en aurait-elle été transformée alors que je n’aurais pas, alors, croisé telle personne ou subi tel événement dont je vois bien que j’ai été transformé ? Read the rest of this entry »

Didier

mars 2nd, 2022

Une vie de chien.

Connaissant les bases du scénario (le pitch comme on dit, non ?), je craignais un peu le pire. L’histoire d’un chien qui se transforme brusquement en homme, tout en gardant sa pauvre cervelle d’animal, voilà qui me paraissait donner la matière d’un court-métrage, nullement celle d’un film. Car elles sont légion, les histoires fondées sur un truc drôle, amusant, fantastique, sur une bonne idée de départ, même, mais qui ânonnent et qui ahanent au bout d’une demi-heure, tous les recoins du récit ayant été utilisés jusqu’au dernier. Read the rest of this entry »

Une femme disparaît

février 28th, 2022

Farfelu sans drôlerie.

Dans la longue kyrielle des films absolument ratés, absolument ridicules du surévalué Alfred Hitchcock (encore tenu par certains comme un réalisateur important de l’histoire du cinéma), ce pensum abracadabrant tient largement sa partie. Aux côtés des plus mauvais films du rondouillard prétendu maître du suspense. C’est bien vrai, Une femme disparaît peut tout à fait s’aligner avec La cordeLa main au colletMais qui a tué Harry ? dans la liste brindezingue des tournages inintéressants, mais qui ne peuvent être critiqués. Tout cela du fait que le gros bonhomme est nimbé d’une aura immarcescible parce que les galopins des Cahiers du cinéma, voulant à tout prix faire disparaître leurs aînés de la Qualité française sont allés le chercher et l’ont promu à un niveau qu’il n’aurait certainement pas revendiqué lui-même, se considérant à juste titre comme un bon artisan du cinéma de divertissement. Read the rest of this entry »

Les randonneurs à Saint-Tropez

février 25th, 2022

Du réchauffé qui attache au fond de la casserole.

Philippe Harel est un réalisateur peu prolifique ; ceci sans doute parce qu’il est souvent exigeant dans le choix de ses sujets. À preuve Extension du domaine de la lutte (1999) qui est une bien intéressante adaptation du roman fondateur de Michel Houellebecq ou bien Le vélo de Ghislain Lambert (2002) qui plonge le spectateur dans le monde singulier des équipes de coureurs cyclistes professionnels de second rang. Mais il s’est surtout fait connaître, en 1997, avec un film sans profondeur, mais bien fait et agréable à suivre, Les Randonneurs. Read the rest of this entry »

Le combat ordinaire

février 22nd, 2022

Si la photo est bonne…

Le film de Laurent Tuel est adapté d’une série de bandes dessinées d’un certain Manu Larcenet qui doit avoir quelque notoriété dans ce domaine. Domaine qui m’est tellement inconnu que je n’ai aucune velléité de l’évoquer, mes références dans le domaine s’arrêtant à Hergé et à Edgar P. Jacobs, C’est comme si, en d’autres termes, je parlais Histoire des haines de Brunehaut et de Frédégonde mises en scène par Augustin Thierry dans ses admirables Récits des temps mérovingiens que sottement on ne lit plus.

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Le poème de l’élève Mikovsky

février 19th, 2022

Très charmant brouillon.

Un an plus tard Pascal Thomas tournera Les Zozos qui est le film le plus clair, le plus juste, le plus tendre, le plus pertinent sur ce qui fut la vie des garçons au lycée avant le funeste et ridicule Mai 68, avant que la mixité s’installe, avant que les adolescents contestent l’autorité des adultes. Il fut en effet un temps, une bulle dans le temps, celle du baby-boom peut-être où les jeunes gens étaient absolument libres dans leurs têtes et dans leurs pensées et absolument contraints par la structure sociale patriarcale qui leur serinait à tout moment qu’ils n’étaient pas encore des adultes et qu’ils devaient obéir avant de prendre plus tard les rênes de la société.

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Les rendez-vous d’Anna

février 18th, 2022

De la difficulté d’être femme.

Au vu du deuxième film que je découvre de Chantal Akerman, je n’ai pas besoin de m’interroger longuement pour comprendre que la réalisatrice est structurellement une écorchée vive. Ce que me confirme ce que j’apprends de sa vie personnelle, notamment de la déportation de ses grands-parents et de sa mère à Auschwitz. D’ailleurs, ça ne rate pas (ou plutôt elle ne se rate pas) : à 65 ans, en 2015, souffrant de troubles maniaco-dépressifs, elle se suicide. Voilà qui est assez clair, qui montre en tout cas combien il est difficile de vivre. Read the rest of this entry »