Quarante-neuvième parallèle

Sans épine et sans parfum…

J’ai été naguère tellement déçu par la vacuité scénaristique de ce qu’il est convenu d’appeler les chefs-d’œuvre de Michael Powell, bizarres, baroques, loufoques même presque quelquefois, que Quarante-neuvième parallèle m’a à peu près intéressé. Et qu’en tout cas ce film de propagande belliciste, film de commande et de pédagogie anti-hitlérienne, m’a paru assez typique du cinéma anglais de l’époque.

49PARALLELEPH2Pourtant l’invraisemblance de l’histoire – un commando allemand qui se faufile dans le canada de 1941 en répandant sur son passage la mort et le sang – devrait prévenir défavorablement ; et le caractère caricatural des péripéties de ce périple est plus risible que convaincant. Mais l’excellente idée réside, comme Bertrand Tavernier le note dans la présentation du film, dans la focalisation faite sur le groupe de nazis représentés comme des gibiers : de ce fait, et malgré leur ignominie, ils parviennent à retenir sinon l’empathie, du moins l’attention : habile procédé qui permet de ne pas tomber dans le facile hallali de la chasse à l’homme.

Même filmés en noir et blanc, les vastes paysages du Canada permettent de présenter de bien belles images, comme les seyants uniformes de la Police montée ; et on n’est pas mécontent, non plus, de constater que l’Amérique du Nord ne se résume pas aux États-Unis, dont la frontière avec le Canada se situe, précisément sur le 49ème parallèle.

49_parallele 09Quelques acteurs de grande qualité, notamment Leslie Howard : le doux Ashley Wilkes de Autant en emporte le vent interprète là un écrivain spirituel et accueillant, un amateur d’art qui sera rendu furieux par la destruction par les Boches de ses toiles de Picasso et de Matisse et d’un livre de Thomas Mann ; Anton Walbrook en guide spirituel d’une communauté hutterienne, une de ces sectes anabaptistes bizarres et antimodernes (un peu semblable aux Amish de Witness) ; en revanche je n’ai pas trouvé Laurence Olivier très bon : il joue le rôle d’un trappeur québécois et son jeu, comme celui de la plupart des grands acteurs de théâtre, est assez outré…

Cela étant, la fin du film est assez amusante, le Nazi survivant berné par de braves employés des Douanes et la morale sauve. Mais c’est exactement le genre de film de propagande dont on ne parlerait plus une seconde s’il n’avait été réalisé par un cinéaste qui bénéficie aujourd’hui d’un grand succès d’estime. J’ai fini de regarder le coffret que j’ai hérité. Je crois que quatre films de Powell m’auront largement suffi à me faire une opinion.

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