Edward aux mains d’argent

Bien des qualités, mais…

Je n’ai rien à reprendre de ce qui a été écrit, ici et là sur le caractère magique du film et je l’ai regardé  avec toute la sympathie qu’il mérite. Mais précisément, c’est là que le bât me blesse un peu : la démonstration est si lumineuse et les caractères si joliment tranchés qu’on se croit assez volontiers dans un univers à la Disney, avec le juste-ce-qu’il-faut de décors affreux, de toiles d’araignée, d’escaliers aux marches gluantes, de portes massives bardées de ferrures hostiles… et, naturellement de maisons acidulées, de pelouses impeccables et de mièvreries diverses.

On peut, bien entendu, rattacher la mythologie d’Edward aux mains d’argent à celle de La Belle et la Bête. Dans le genre pauvre être innocent, au cœur tendre et à l’âme pure, je dois dire néanmoins que je pense davantage et que je suis plus à l’aise avec Frankenstein et ses épigones, et notamment avec l’interprétation qu’en donne Robert De Niro dans Mary Shelley’s Frankenstein de Kenneth Branagh, puisque dans l’un et l’autre cas, le désastre de la construction d’un être contre nature conclut sur le triste échec de la vision prométhéenne, vouant les pauvres créatures à l’incompréhension, à l’abandon et à la désolation. Il y aurait peut-être aussi un parallèle à faire avec Le garçon aux cheveux verts, fable humaniste de Joseph Losey, mais il y a trop longtemps que j’aie vu le film pour me le rappeler exactement.

Voilà qui est bien grave pour évoquer un film charmant, nourri de trouvailles délicieuses et même quelquefois simplement très belles (le jardin empli de topiaires autour du vieux château, que Peg (Dianne Wiest) découvre avec émerveillement lorsqu’elle franchit pour la première fois la porte du domaine inconnu), ou d’idées ravissantes, comme cette neige qui tombe désormais si souvent sur les maisons de la vallée lorsque Edward redevenu solitaire taille les statues de glace en songeant à Kim (Winona Ryder).

Ce n’est pas tout à fait le cinéma que j’aime, mais c’est bien mieux qu’un film pour teen-agers comme je le craignais.


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