Arachnophobie

« Et ma blême araignée, ogre illogique et las… »

Que les spectateurs impatients et pressés se rassurent : une fois les sept ou huit premières minutes d’Arachnophobie regardées, ils peuvent passer à autre chose et, comme on le disait naguère à la télévision, reprendre leurs activités habituelles. Les premières minutes, en effet, présentent un des plus spectaculaires sites de notre Terre, qui en compte pourtant beaucoup : le Salto angel au Vénézuela, la plus haute chute d’eau du monde (979 mètres), située en rupture d’un plateau stupéfiant. C’est encore plus extraordinaire que le début d’Aguirre de Werner Herzog et de la descente des pauvres gens vers la vallée.

Une équipe de scientifiques, essentiellement entomologistes, vient explorer les tréfonds du gouffre, dont les conditions extraordinaire n’ont pas varié depuis trois millénaires et qui, donc, sont censées abriter des espèces encore ignorées. Ça ne rate pas : une araignée inconnue pique et tue un photographe crétin et puant, Jerry Manlay (Mark L. Taylor) dont le cercueil sera rapatrié vers son pays d’origine, l’Ouest étasunien. Mais – attentifs comme nous pouvons être et sommes, en fait ! – nous avons bien remarqué qu’une saloperie à huit pattes s’est installée dans le cercueil du malheureux.

Dès lors, il faut n’avoir jamais vu le quart du tiers d’un film de série étasunien horrifique pour ne pas comprendre et imaginer les développements qui vont suivre. Et qui, de ce fait, sans aucune innovation et sans aucune surprise vont porter le film de Frank Marshall jusqu’au format à peu près réglementaire de 103 minutes. Au cas où certains auraient gardé une dose excessive d‘esprit d’enfance, je n’ai aucun scrupule à annoncer qu’après une lutte acharnée contre les arachnides qui ont proliféré dans la calme bourgade de Californie et ont fait passer de vie à trépas une bonne quantité de pauvres malheureux, les braves héros du film retrouveront un confort typique de l‘american way of live.

Ces héros, ce sont les membres d’une sympathique famille de la classe moyenne supérieure. Le docteur Ross Jennings (Jeff Daniels), las du tohu-bohu de San Francisco a cru pouvoir, comme beaucoup, changer de vie en gagnant la campagne où un vieux médecin, Samuel Metcalfe (Henry Jones) lui a fait miroiter qu’il lui cédait sa clientèle, comme le fait le Docteur Parpalaid vis-à-vis du docteur Knock. Mais Metcalfe change d’avis et ne prend pas sa retraite.

Et pendant ce temps là les bestioles sévissent gravement et assassinent à qui mieux mieux les braves habitants de la bourgade. Voilà qui fait partie de ce qu’on. pourrait appeler le service minimum, puisqu’il est bien évident que la vivacité, la cruauté, la nocivité des araignées va, au moins dans un premier temps, prendre le pas sur les braves gens qui comprennent à peine ce qui se passe.

Heureusement et au bout d’un minimum d’interrogations existentielles et d’errances dans de fausses pistes, tout le monde se retrouve à traquer le nid maléfique où la reine araignée métastase ses milliers d’œufs. Encore une bonne bagarre où l’ingéniosité et le courage des hommes fait flèche de tout bois et reçoit nos applaudissements enthousiastes et l’horreur venue du sud du Rio Grande sera annihilée. Pour cette fois tout au moins. On respire avec la vertueuse fédération.

Mais le spectateur n’a pas eu son content d’émotion, pourtant. Il n’a douté à aucun moment que le Mal pouvait l’emporter sur le Bien. C’est ballot, non ?

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