Demain ne meurt jamais

Indigent et vieillot.

La première apparition de Pierce Brosnan dans le rôle de James Bond m’avait laissé narquois, mais bienveillant. C’était dans Goldeneye et, même en jugeant que la série, blessée à mort par l’absence de son incarnation évidente, Sean Connery, ne se perpétuait à grand peine, j’avais trouvé le spectacle plutôt bien ficelé. Il n’y avait plus rien de commun, c’était tout autre chose, une sorte de plaisante et faramineuse collection d’âneries à la sauce explosive, mais presque un pastiche des belles années Fleming. Ça méritait, à mes yeux, la moyenne dans le genre, ce qui était indulgent et résigné.

Demain ne meurt jamais ne présente aucune des petites qualités très mineures de Goldeneye : c’est une sorte de soufflé indigeste et dégoulinant d’arômes de synthèse, un ice-cream baveux, une ratatouille graisseuse qui réunit, en près de deux heures, non seulement une collection de stéréotypes, de clichés, de poncifs épuisés et qui, malgré un montage fatigant à la limite de l’hystérie visuelle, parvient à faire bâiller d’ennui le spectateur.

demain_ne_meurt_jamais_photo_3L’intrigue est à la fois d’une complication inouïe et d’une niaiserie indigente, le méchant, un vilain magnat de presse, Elliot Carver (Jonathan Pryce) paraît bien insignifiant au regard des grandes figures du passé que ce soit Auric Goldfinger, Rosa Klebb (Bons baisers de Russie), Ernst Blofeld (On ne vit que deux fois ou Au service secret de Sa Majesté) ou même le Dr. Kananga (Vivre et laisser mourir).

Pour satisfaire aux exigences de la mondialisation, la James Bond girl de service est une Asiatique, agent chinois (Michelle Yeoh au physique passe-partout), qui ne dispose que d’une remarquable capacité à envoyer des coups de savate, mais ne retient en aucun cas la même lumière que le faisaient Ursula Andress (Dr. No), Honor Blackman (Goldfinger), Claudine Auger (Opération Tonnerre) et bien sûr Diana Rigg (Au service secret de Sa Majesté), celle-ci, au demeurant, la seule femme que Bond ait jamais aimée et épousée.

michelle-yeah-pierce-brosnan-442a-diaporamaComme dans Goldeneye, et autre concession au politiquement correct, le supérieur hiérarchique de Bond, M est une femme (Judi Dench) ; dans le film précédent, elle arborait vis-à-vis de 007 un ton méprisant et féministe. Dans Demain ne meurt jamais elle veille d’un œil à la fois maternel et incestueux sur ce grand gamin qui paraît atteint du syndrome de Peter Pan. C’est dégoûtant.

Les prétentions de modernité font aujourd’hui crouler de rire ; on est dans un film qui se veut high-tech et comme l’extrême modernité est ce qui se démode le plus vite, on peut à loisir se moquer aujourd’hui du GPS présenté comme une innovation bluffante et des piles de cassettes vidéo à gros boîtiers plastique (il me semble même qu’un instant on distingue des disquettes informatiques 3 pouces). Tout cela paraît antédiluvien.

Pourquoi mets-je 1 et non pas 0, alors ? Pour l’inventivité des cascades et par sympathie pour les zigues qui dessinent les story boards qui dépensent beaucoup d’efforts pour pas grand chose.

Leave a Reply