La loi du silence

Mélodrame nigaud.

J’en suis toujours à me demander ce que le monde du cinéma a bien pu trouver à Alfred Hitchcock pour le placer sur une telle éminence cinématographique et faire de ce réalisateur banal et débonnaire une des lumières du Septième Art. Plutôt plus limité que Gilles Grangier ou Georges Lautner il bénéficie d’adulations invraisemblables pour son cinéma bien souvent routinier et ce n’est pas grâce à quelques films assez réussis (La mort aux troussesPsychoseFrenzy) qu’il survivra pour la postérité. Écrivant cela je me rends compte que le gros homme est mort il y a plus de quarante ans et que son aura ne paraît pas décliner. Quelle pitié !

La loi du silence est un des mélodrames les plus niais que j’aie jamais vu. S’établissant sur le sujet toujours excitant, pour les incroyants, du secret de la confession, c’est-à-dire de la certitude de ce que l’on confie à un prêtre ne pourra en aucun cas être rapporté par lui à qui que ce soit, il construit un récit bêtifiant, nourri d’invraisemblances et de grandiloquences qui n’a rien à envier aux Deux orphelines ou à La porteuse de pain, grandes gloires des melliflues pleurnicheries d’avant.

Un triste bonhomme, Otto Keller (O.E. Hasse) et sa femme Alma (Dolly Haas) réfugiés à Québec dont on ne sait d’où ils viennent et ce qu’ils ont connu sont employés dans un presbytère mais n’ont pas assez d’argent pour envisager un avenir convenable. D’où l’idée d’Otto d’aller cambrioler 2000 $ chez le riche homme d’affaires Vilette (Ovila Légaré). Manque de pot, il ne fait pas que le cambrioler, il le tue. Et, alors que rien ne paraît le trop gêner, après le crime, il ressent le besoin de se confesser et de livrer son secret à l’abbé Logan (Montgomery Clift), prêtre de la paroisse qui l’héberge. L’affaire est donc alors verrouillée, puisque, comme dans L’auberge rouge, le dépositaire du secret n’a aucune possibilité de le divulguer.

Tout cela irait encore si ne se greffait sur cet exemplaire cas de conscience une intrigue assez ridicule entre le prêtre et son ancienne amoureuse Ruth (Ann Baxter) qui, dépitée du silence et de l’entrée dans les ordres de Logan, s’est mariée avec un avocat (ou parlementaire ? la chose n’est pas claire) Pierre Grandfort (Roger Dann) qui l’aime et qu’elle n’aime pas (et ne le lui a pas caché). Voilà qui est très clairement cucul-la-praline et qui avance sans surprise vers son aboutissement.

Car il va de soi que le pauvre prêtre Logan est d’emblée suspecté d’avoir assassiné le méchant Villette, pour dix raisons que j’ai la grande flemme d’évoquer. L’étau policier, puis judiciaire se resserre contre lui sans que les raisons qui auraient pu expliquer son éventuel crime soient établies.

Comme – il faut bien lui reconnaître quelques qualités – Alfred Hitchcock met un certain rythme dans ses réalisations, on ne s’ennuie pas trop. Toutefois chaque péripétie est tellement prévisible, tellement grosse de celle qui va la suivre, qu’on n’a pas une minute la sensation d’être dans un film de suspense : on sait très bien que tout va s’arranger ductilement, que les méchants seront punis et que les bons s’en sortiront.

Vous me direz que les neuf dixièmes des films sont de cette même veine. Je ne prétends pas le contraire. Ce qui m’agace c’est que l’outre Hitchcock soit célébrée sur tous les tons. Il y a tellement mieux à voir au cinéma ! Notons aussi que la musique du célèbre Dimitri Tiomkin oscille entre le bêta et l’emphatique. Belle performance !

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