L’Animal

Intermittents du spectacle.

C’était l’époque où Jean-Paul Belmondo, immense vedette, alternait entre des rôles de policiers désinvoltes et peu attentifs au Code de procédure pénale et des parodies où il pouvait donner le meilleur de lui-même. Tout au moins lorsque les scénarios étaient à la hauteur et que le réalisateur était Philippe de Broca qui lui avait donné un des deux ou trois meilleurs rôles de sa vie dans L’homme de Rio. Mais après Le Magnifique, en 1973 (déjà un double rôle !) et surtout L’Incorrigible en 1975, Broca a dû sentir que la veine était un peu lasse. Le public en demandant encore et encore, c’est Claude Zidi qui s’y est collé pour tourner L’Animal en 1977.

Zidi était une sorte d’assurance tous-risques pour les producteurs à qui il faisait gagner beaucoup d’argent, avec la série des films des Charlots, engagée par Les bidasses en folie en 1971, avec La moutarde me monte au nez de 1974 (pour profiter du succès du lunaire Pierre Richard, avec L’aile ou la cuisse – un des moins mauvais films de Louis de FunèsClaude Zidi n’est d’ailleurs pas dépourvu de tout talent, puisqu’en 1984, il mettra en scène les excellent Ripoux. C’est donc lui, en 1977, qui reprend le flambeau des parodies de Belmondo, avec une distribution dense, qui se paye même le luxe de placer au premier plan féminin Raquel Welch, une des jolies filles les plus spectaculaires du cinéma et que, dans le film, on détaille sur toutes les coutures. Ce qui n’est évidemment pas un reproche.

Le reste de la distribution, autour des deux stars, est solide: les amis fidèles Julien Guiomar et Charles Gérard, mais aussi Aldo Maccione, qui comptait, à l’époque ; et une kyrielle de têtes jadis connues (Henri GénèsMario David) ou qu’on allait bientôt connaître (Josiane BalaskoRichard Bohringer). Et les invités d’une séquence : Claude ChabrolJohnny HallydayYves Mourousi, Jane Birkin. Pour qui pense comme moi que la qualité d’un film passe beaucoup par la qualité des seconds rôles, voilà un bon point !

De prime abord le scénario ne paraît pas mauvais et le regard placé sur les utilités du cinéma, ceux qui courent le cachet et sont tenus pour des moins que rien par toute la smala des réalisateurs et assistants, des directeurs techniques et des acteurs de premier rang est intéressant ; ceci même s’il est loin d’être aussi acide qu’il pourrait l’être et tourne trop à la farce. Michel Gaucher (Jean-Paul Belmondo), ce cascadeur minable et maladroit qui rate à peu près tout ce qu’on lui demande et entraîne dans ses malchances sa ravissante fiancée Jane Gardner (Raquel Welch) n’est pas mal dessiné.

Pourtant le début du film est assez poussif et ne s’accélère que lorsqu’intervient l’autre élément du scénario : la parfaite ressemblance de Gaucher avec Bruno Ferrari, idole chérie du public mais trouillard majuscule qui ne veut pas prendre le moindre risque dans un film censé être d’action. L’efféminé Ferrari, perpétuellement entouré d’une cour de folles piapiatantes, doit donc être doublé. Et au casting, évidemment c’est son sosie parfait qui est retenu. Cette partie de l’histoire n’est pas du tout réussie ; et pourtant, paradoxalement (ou non ?), c’est là que Michel Audiard claque ses meilleures répliques (mais enfin il ne s’est pas foulé beaucoup).

Toujours est-il qu’il y a beaucoup de scènes pénibles et languissantes. Belmondo fait ce qu’il peut, virevolte et cascade, réussit même un réel exploit en se débattant avec un avion, mais ne parvient pas à sauver L’animal de la médiocrité.

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