Les mistons

On n’est pas sérieux quand on a quatorze ans…

François Truffaut, dans Les cahiers du cinéma avait abondamment daubé sur la fausse image de l’enfance délinquante que présentait Jean Delannoy dans Chiens perdus sans collieradaptation d’un roman éponyme de Gilbert Cesbron, romancier à l’immense succès, spécialisé un peu dans les faits de société, comme on dit aujourd’hui ; et il a eu envie de réaliser avec son premier vrai film, un court-métrage sur l’enfance et ses désordres. Une bande de gamins qui s’ennuie donne la chasse à un couple d’amoureux qui aimerait être un peu tranquille pour voir la feuille à l’envers. Et un jour, quelques mois plus tard, ils apprennent que le garçon (Gérard Blain) s’est tué en montagne. C’est, d’une certaine façon, la fin de l’enfance…

Les Mistons ne sont pas des voyous : ce sont des galopins insouciants, pas très bien élevés, certes, mais pas du tout voleurs (ou, s’ils l’étaient, on les appellerait des chapardeurs, des voleurs de pommes) ; espiègles, farceurs, évidemment fascinés par tout ce qui touche au sexe et à la nudité, mais ne concevant pas le moins du monde qu’il puisse exister ce qu’aujourd’hui on appelle des tournantes.

Seulement, 1957, 1958, c’est le début de l’arrivée au premier rang des gazettes de ce qu’on appelait les blousons noirs, des adolescents qui, eux, commencent à dépasser les bornes (même si, depuis lors, les bornes ont sacrément reculé !) ; et les réalisateurs affluent : Les Tricheurs (triomphe public, film surfait) puis Terrain vague de Marcel CarnéBoulevard de Julien Duvivier ; je crois que tous ces films ont été terriblement ringardisés par le regard vrai porté par Truffaut dans Les Quatre cents coups

Pour revenir aux Mistons, c’est un moyen métrage délicieux, illuminé par la terriblement vivante Bernadette Lafont et la qualité du regard porté sur Nîmes en été, dont on sent presque (d’ailleurs pourquoi, presque ?) la chaleur, la poussière et le bruit des fontaines…

C’est un film très frais sur la sortie de l’enfance et la rugosité de la découverte que le monde n’est pas qu’un grand jeu.

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