L’été meurtrier

Empire des nuages.

S’il n’y avait la somptueuse beauté nue d’Isabelle Adjani montrée avec une certaine complaisance et dont l’apprition a durablement scotché les spectateurs, qu’est-ce qui resterait de L’été meurtrier, aujourd’hui, de cette histoire alambiquée et mélodramatique, à quoi les acteurs, si bons sont-ils, ne croient pas et dont les dialogues sont parmi les plus pauvres qu’on puisse voir au cinéma ? Naturellement, au fil des rediffusions télévisées, tout le monde a vu le film et à chaque fois on s’y laisse un peu prendre.

Isabelle Adjani joue l’idiote avec beaucoup de talent mais en forçant tout de même pas mal le trait ; pouvait-on imaginer, en la voyant et en la trouvant extrêmement sexy (mais le cinéma n’est pas avare de jolies filles !) qu’elle était une actrice jugée importante, espoir glorieux du théâtre français et capable de fasciner dans un film aussi hypnotique que Mortelle randonnée ? Voilà une question ! Car comment imaginer aussi qu’elle a pu tourner des scènes grotesques, aberrantes comme celle, par exemple, où elle tête – littéralement ! – sa mère (Maria Machado), dans une scène glaçante de ridicule ou, plus encore sans doute,le dîner avec son ancienne institutrice (Évelyne Didi) au restaurant, qu’Éliane oblige à aller retirer son soutien-gorge et à demeurer en corsage transparent pour le reste du repas…

La première partie du film, pourtant, est très agréable à voir, la description du village, l’atmosphère des fêtes rurales, du bal populaire, la présentation de la famille de Florimond Pimpon (Alain Souchon, plutôt intéressant) bien fichue. On aime voir Jenny Clève (la mère de Pimpon), Suzanne Flon (sa tante, la sourdingue), son père (Roger Carel) et ses frères (dont François Cluzet).

C’est très outrancier, très caricatural, mais enfin, ça passe tout de même. Mais lorsqu’on en arrive à l’avancée du drame, on part dans le délire le plus complet, larmoyant, ridicule, prétentieux, plein de bouffissures et d’emphase. Mettons de côté la musique, la lumière, les paysages ; on me dira que c’est déjà pas mal et que le film se laisse voir. Sans doute, mais – j’y reviens ! – ôtez Adjani toute nue qu’est-ce qui reste, 35 ans plus tard ?

Eh bien il reste précisément un film presque mythique, plutôt ridicule et outrecuidant, mais qui repasse trois fois par an à la télévision et qu’à chaque fois quelques millions de spectateurs regardent. C’est ce genre de questionnement qu’il n’est pas absurde d’affronter…

 

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