Loulou

445376_fullPialat me hérisse

Quoi qu’on vous en dise, quoi qu’on vous en raconte, avec les meilleurs arguments du monde et toute la bonne volonté qu’on peut y mettre, il y a des trucs qui ne vous plaisent pas, avec quoi vous n’avez pas d’affinités et qui ne vous disent rien. Un peu comme sur la carte d’un grand restaurant, finalement : on vous propose des plats dont vous êtes certain qu’ils ont de la qualité, mais qui ne vous intéressent pas. Dans le registre années 70/80, je prends tous les Sautet et m’en enchante à chaque vision ; et à chaque fois que je m’aventure dans un Pialat, j’y suis mal à l’aise.

Je ne dis pas, pas du tout que c’est mauvais, inintéressant, surfait, détestable, mais ça ne me plaît pas. Ou, plutôt, ça m’agace. Je n’ai pas une très grande connaissance du réalisateur, mais je n’ai pas très envie de découvrir davantage que ce que j’ai vu : jadis Van Gogh (mais comme je ne peux pas piffer le peintre, c’était un peu biaisé) ou Sous le soleil de Satan (mais entrer vraiment dans Bernanos, c’est très compliqué, presque impossible). Plus récemment À nos amours, qui m’a laissé en plein débat avec moi-même.

76ed83ae-7cc2-4014-b72e-000000000322Et Loulou, donc. Façon de filmer à la fois brouillonne et intelligente. Je ne suis pas très exact en écrivant façon brouillonne : je sais que Maurice Pialat, voulant capter la vie, son tohu-bohu, son mouvement permanent, épuisant, énervant, la filme avec cette violence et cette aigreur ; ceci, même si je m’y sens mal à l’aise, n’est pas mal conçu du tout : c’est le bruit et la fureur de l’existence, la faiblesse et la lâcheté des hommes et des femmes, leur veulerie, la laideur de la vie quotidienne, l’absence de toute espérance.

Gérard Depardieu avait encore 1980, la fraîcheur, presque l’ingénuité de son immense talent. Un peu davantage, même : on sent en lui une telle vitalité, une virilité si abondante qu’il envahit l’écran sans partage, malgré toute la qualité du jeu de Guy Marchand, qu’on a vu rarement mauvais, d’ailleurs. Isabelle Huppert est, de son côté, tellement naturelle, tellement spontanée qu’on en arrive à marcher et à croire à son personnage lâche, exaspérant, immature, velléitaire.

Il n’y a que des crapules ou des minables dans Loulou. Comme le dit Depardieu dans un moment de lucidité sarcastique Je me demande ce que je fous avec un mec comme moi.

Un cinéma que je n’aime pas. Mais du cinéma, vraiment, évidemment

(Je dois dire que j’ai beaucoup, beaucoup changé d’avis sur Maurice Pialat depuis que j’ai vu Loulou et que je suis à deux doigts de renier ce que j’ai écrit sur ce film ; mais il faudrait, pour être cohérent et loyal, que je le revoie).

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