Partir

Lèvres en feu, reins en chaleur.

Catherine Corsini, la réalisatrice de Partir, est de celles qui cochent toutes les cases de la bien-pensance : progressiste, immigrationniste, active soutien des délinquants sans-papiers, naturellement féministe et lesbienne et, non moins naturellement, soutien de l‘Insoumis majuscule Jean-Luc Mélenchon. Par ailleurs elle ne manque ni de soutiens financiers et critiques (c’est normal, avec un tel palmarès d’excellence virtuelle), ni de talents d’écriture et de réalisation. Talents qu’elle emploie à déconstruire, comme on dit, la structure traditionnelle de la société. Elle s’y était employée, en 1999 dans La nouvelle Ève, avec Karin Viard, ayant toutefois l’élémentaire honnêteté intellectuelle d’indiquer qu’elle n’avait rien de mieux à proposer, après la décomposition, que la douceur tranquille du traditionnel happy end amoureux (sur un champ de ruines, celui-là).

Champ de ruines aussi que ce Partir à qui d’excellents acteurs prêtent leurs grandes qualités, qui est vivement mené, bien filmé, bien tenu et où l’on sent à chaque minute monter la tension d’une catastrophe notifiée dès le pré-générique. Puis apaisement bienvenu. Un couple tranquille : Samuel (Yvan Attal) est un prospère médecin nîmois ; elle, Suzanne (Kristin Scott-Thomas), d’origine anglaise, qui s’ennuie un peu, voudrait reprendre son ancien métier de kinésithérapeute. Deux beaux enfants de la belle bourgeoisie de province, David (Alexandre Vidal) et Marion (Daisy Broom), adolescents qui paraissent sans autre histoire que celles de leur génération dorée.

Justement, il n’y a pas d’histoires. Tout va trop bien. Ce n’est pas si mal que ça, il me semble, à l’heure où il y a beaucoup de gens qui pleurnichent sur leurs vies ratées, gâchées, abîmées, catastrophiques. Il faut qu’il se passe quelque chose. Ce quelque chose, c’est en fait quelqu’un : Ivan (Sergi Lopez), un robuste, viril, anguleux ouvrier du bâtiment, qui vient de sortir de prison pour quelques babioles dont on ne saura rien. Est-ce l’ennui, l’animalité du type, un déchaînement de la sexualité qui va précipiter Suzanne dans les bras d’Ivan et la rendre complétement dépendante des étreintes qui s’enchaînent et qui l’émerveillent ? Va savoir !

Toujours est-il qu’au bout de quelques semaines de parties de jambes en l’air, Suzanne n’est plus capable de discerner ses devoirs de mère de famille et ses gratouillis intimes qui la poussent à sacrifier sa vie pondérée, sereine, aisée, apaisante. Malgré les tentatives désespérées de Samuel/Attal qui est fier de sa jolie femme mais qui, en est, aussi, violemment amoureux, la belle bourgeoise tranquille s’envole aux côtés du repris de justice et entreprend de nouer avec lui une histoire amoureuse.

Au point de tout quitter ? Bien sûr ! Et comment donc ! Voilà que la gentille épouse, saisie par la passion charnelle, abandonne tout, mari et enfants, sans songer le moins du monde au désastre qu’elle créé. Pourquoi pas ? On a vu ces folies prospérer. Et ce qui n’est pas mal du tout dans le film de Catherine Corsini, c’est cette sorte de marche à l’abîme qui détient une impeccable logique mortifère, destructrice de toute la tranquillité antérieure. C’et entendu ! Suzanne s’enquiquinait un peu dans la sagesse impeccable d’avant. Lorsque le film s’achève, elle a assassiné son mari, rendu orphelins ses enfants et se retrouve balbutiante, éperdue… et ridicule devant son amant Ivan.

Magnifique ! On dit Bravo ! et on en redemande.

C’était mieux avant.

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