Rien que pour vos yeux

On ferme !

Je suis assez partagé sur cet opus, tout de même le douzième d’une série qui s’épuisait de façon évidente (avant même les désastres ultérieurs, composés avec du tout et du n’importe quoi, en tout cas jamais avec de l’authentique Ian Fleming). Partagé parce que l’histoire contée est assez attrayante, plutôt originale, les scènes de bravoure extrêmement bien ficelées, la publicité pour la robustesse de la 2CV orgueilleusement française, le retour du pré-générique sur la tombe de Teresa Bond, unique amour de Bond (et si bien interprété par Diana Rigg dans Au service secret de Sa Majesté) émouvant et Carole Bouquet bien belle.

Mais c’est tout de même une fin d’époque ; c’est la cinquième interprétation de Roger Moore, ennuyeux caramel mou, qui n’a certes jamais eu la cruauté, la férocité de Sean Connery mais gère de façon de plus en plus pépère le personnage, retirant toute crédibilité à la légende. Et puis comme Bernard Lee, qui interprétait jusque là le rôle de M, chef du MI6 et supérieur hiérarchique de Bond, est mort juste avant le tournage de Rien que pour vos yeux, il ne figure évidemment pas dans le film. Desmond Llewelyn, l’éternel Q, le Géo Trouvetout britannique, est obligé de quitter les brumes de la verte Albion pour venir aider Bond (et on imagine son frémissement d’horreur devant tous ces méridionaux qui cuisinent à l’huile d’olive). Et puis le clin d’oeil final où l’on voit Margaret Thatcher, premier ministre de Sa Majesté, en cuisine est un peu pitoyable.

Le pire est toutefois le triste spectacle donné par Lois Maxwell, immuable Monneypenny depuis 1961 et le Dr. No ; Bond n’est pas censé prendre des rides, Monneypenny non plus ; mais quoi qu’on fasse, tempus fugit ; et la jeune femme au teint frais qui n’avait que 34 ans et donnait une image de jeune bréhaigne délicieuse est désormais visiblement ménopausée et ses afféteries ne sont plus de mise. Et, naturellement, les graveleux sous-entendus anglo-saxons ; Je vous paye une glace à trois boules ? propose Bond à la jeune patineuse nymphomane Bibi (Lynn-Holly Johnson). Ouaf-ouaf !

Il y a plein de cascades assez spectaculaires en voitures, à skis, motoneiges, bobsleigh, sur un tremplin de saut. Mais finalement le spectaculaire tue le spectacle.

Heureusement il y a cette belle exploration des monastères érémitiques de Thessalie (les Météores) avec des scènes bienvenues. C’est ce dont on se souvient. Pas davantage.

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