Sans toit ni loi

Finalement, et pour toujours…

Je sais bien que Sans toit ni loi est une des œuvres les plus bouleversantes qui se puisse sur l’errance et la solitude. La grande force d’Agnès Varda, c’est que là, bien loin des héroïnes de Cléo de 5 à 7 ou du Bonheur, il n’y a aucune sympathie possible pour Mona (et naturellement, je n’évoque pas Les glaneurs et la glaneuse où l’empathie est manifeste).

On ne sait pas d’où Mona vient – ce dont, à la limite, on pourrait se passer pour l’aimer -, mais surtout on ignore où elle va, et si même elle cherche quelque chose, quelque part. Elle est tellement loin, tellement étrangère qu’il n’y a aucune identification possible ; elle pue, elle vole, elle n’a ni reconnaissance, ni haine, ni chaleur humaine. D’où la stupéfaction exaspérée ou effondrée de ceux qui voudraient l’aider, la secourir, lui permettre de vivre, le berger soixante-huitard, la platanologue (excellente Macha Méril).

Pour autant, Mona n’est ni révoltée, ni vraiment suicidaire, elle ne substitue pas une loi inversée, révolutionnaire à la loi commune ; elle peut être délicieuse, joueuse, vraie gamine, comme avec la vieille dame, ou abêtie d’alcool et de veulerie, comme avec la bande finale.

Une autre idée superbe de Varda est de montrer le Gard d’hiver, les arbres dénudés, la vigne rognée, les villages désertés ; ce paysage fait pour le soleil, paysage de vacances pour la plupart d’entre nous, est, finalement, d’une froideur extraordinaire .

Le DVD, conçu et réalisé par Varda elle-même est un modèle de ce qu’il faudrait faire, avec des boni plus intelligents les uns que les autres et un vrai commentaire de la réalisatrice qui permet de voir des subtilités qu’on n’avait pas décelées après plusieurs visionnages, comme c’est mon cas : ainsi cette leçon de cinéma qui montre que chacune des séquences commence par un plan de Mona marchant seule…

J’oubliais de dire un mot – forcément hyperlaudatif – sur Sandrine Bonnaire ; mais franchement, vous croyez qu’elle a besoin de cette admiration ?

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