Sherlock Holmes

Drôle de paroissien.

J’ai l’impression que les auteurs et le réalisateur ont instillé, pour leur jeune public, quelques exercices obligés dès que l’on évoque le magnifique détective créé par Conan Doyle : notamment la capacité de déduire, à partir de quelques traces ou indices, la nature, la profession, le cheminement de ceux devant qui il se trouve ; indices dont il va s’emparer pour démonter les certitudes et les évidences ou clouer au sol les déterminations en rase-mottes des policiers butés. Aussi sa connaissance encyclopédique de toutes les substances, machineries, complications, mécaniques de son époque ; d’ailleurs il est bien certain que Ian Fleming, en créant son personnage de James Bond s’est inspiré de la polyvalence de ce héros mélancolique, mélomane et dépressif.

Tiens, dépressif, pourquoi, dans le film de Guy Ritchie ? Parce que Holmes (Robert Downey Jr.) ne vit que dans l’action, la traque des criminels de haut rang, mais aussi parce qu’il fait la gueule à cause de la décision de son ami, le docteur John Watson (Jude Law) de se marier avec la séduisante Mary (Kelly Reilly) et donc d’abandonner le ménage de vieux garçons que les deux hommes formaient, à leur satisfaction réciproque.

Cette grande machine étasunienne n’est pas désagréable, malgré les tics de réalisation qui émaillent trop souvent les films de l’époque. Comme les trucages numériques étaient encore une innovation, le réalisateur en abuse, comme il abuse des zooms ultra-violents et de toutes les facilités possibles. De la même façon, les bien trop nombreuses batailles avec des pratiques de kung-fu, aujourd’hui si ringardes (enfin… je pense ; je ne vais pas voir les films appréciés par les crétins décérébrés), batailles qui alourdissent la trame du film. Film d’ailleurs bien trop long, de plus de deux heures, dont on aurait pu retrancher une bonne vingtaine de minutes.

Et pour autant, disais-je, ce n’est pas désagréable. À tout le moins si l’on accepte de s’évader des traditionnels récits des exploits du locataire de Baker street. Là, dans une conception très cosmopolite du personnage, on assiste, au milieu d’un décor victorien, à l’irruption de l’irrationnel dans le récit scientiste de Conan Doyle. Holmes se heurte à Lord Henry Blackwood (Mark Strong) qui fait appel à la magie noire pour s’imposer au premier rang et prétendre imposer au monde entier sa puissance et sa dictature. Ce n’est pas mal du tout cela, d’autant qu’à certains moments Holmes est à deux pas de s’engager dans les chemins les plus invraisemblables en abandonnant les bases solides de la réalité.

Toutes les mystagogies s’évaporeront à la fin et Holmes expliquera aux spectateurs bluffés comment les surprenantes péripéties s’expliqueront finalement par des astuces, trucs, procédés plus ou moins habiles. N’empêche que, si l’on suit avec sympathie le déroulement de l’histoire – compliquée mais cohérente – on ne s’ennuie pas, même si on a du mal à supporter les explosions, expansions, crépitations trop facilement dispensées.

On ne reverra pas, mais on ne s’est pas ennuyé, c’est déjà bien, n’est-ce pas ?

Leave a Reply