Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Le sorcier du ciel

lundi, décembre 4th, 2023

À l’usage des patronages d’antan.

C’est vraiment très, très difficile de faire passer à l’écran ce que peut être la ‘’Sainteté’’ ; très difficile de montrer, même de loin, cette grâce incroyable, de la faire entrevoir. Je ne connais guère que Thérèse, le merveilleux film d’Alain Cavalier qui s’en approche. Aussi, comme on ne peut pas vraiment représenter la Sainteté, on tente de s’en approcher, à travers les vies de saints, qui sont plus anecdotiques. Certaines sont réussies, même davantage : Le chant de Bernadette d’Henry King (1943), Monsieur Vincent de Maurice Cloche (1947) ou Hiver 54; l’abbé Pierre de Denis Amar, Mais il y a aussi tant d’autres nullités comme Miracle à Cupertino d’Edward Dmytryk et tant d’autres sulpicionnaiseries. Le bon peuple demande généralement des gentillesses melliflues, rarement la dureté fouettante de la Foi. (suite…)

Testament

mercredi, novembre 29th, 2023

Sous l’œil des barbares.

Le Québécois Denys Arcand a posé d’emblée les bases, de façon très littéraire, très intelligente et même très intellectualisée : Le déclin de l’empire américain en 1986 et sa suite immédiate (si j’ose écrire) 18 ans plus tard, Les invasions barbares. On perçoit qu’on n’est pas dans l’exaltation heureuse, davantage dans ce que j’avais appelé la course à l’abîme qu’est la gangrène mentale du Monde occidental dans mon avis sur le deuxième film et son épuisement vital. Pourquoi pas, après tout ? Nous avons dirigé le monde pendant mille ans ; il est possible qu’il soit équitable de laisser la place à d’autres (et, dans cette optique,les trois dernières minutes de Testament, que je ne dévoilerai pas, ouvrent des pistes, qui se situent en 2042). (suite…)

Faubourg Montmartre

samedi, novembre 25th, 2023

Les beaux mélos du temps jadis.

Raymond Bernard avait déjà atteint une assez belle notoriété (Le miracle des loups en 1924), lorsqu’il réalisa son premier film parlant avec Faubourg Montmartre en 1931. Sa carrière se développa ensuite avec amplitude : Les croix de bois en 1932, Tartarin de Tarascon en 1933, surtout Les Misérables en 1934 ; beaucoup prétendent que c’est là la meilleure adaptation du roman de Victor Hugo ; ce n’est pas du tout mon avis, d’ailleurs. Puis, assez curieusement, cette carrière s’infléchit et baisse de ton, sans qu’il y ait d’ailleurs un rapport avec la césure de la Guerre qui a modifié tant de destins. Mais Marthe Richard au service de la France en 1937, Un ami viendra ce soir en 1946 et surtout (surtout !) La belle de Cadix avec Luis Mariano en 1953 sont d’un niveau plutôt médiocre. (suite…)

Je vais craquer

lundi, novembre 13th, 2023

Qui est in ? Qui est out ?

Un film qui est presque aussi accablant et désespérant qu’une comédie italienne de la grande époque ; un film qui fait qu’on se moque, qu’on rie, qu’on ridiculise le personnage principal, Jérôme Ozendron (Christian Clavier), qui a toutes les raisons de l’être, moqué, ridiculisé, méprisé mais qu’on retrouve, frère humain, dans l’épouvantable situation de la vie. Un peu comme à la fin des Visiteurs lorsque Jacques-Henri Jacquart, le descendant de Jaquouille-la-fripouille, se retrouve expulsé de sa tranquillité moderne au 12ème siècle (peu de choses me glacent autant que cette course terrifiée de Jaquouille vers le donjon du seigneur, vers la vie affreuse qu’il va devoir vivre, homme de notre temps abandonné aux horreurs du haut Moyen-Âge).
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L’effet papillon

jeudi, novembre 9th, 2023

La guerre des mondes.

Il n’y a rien d’étonnant à ce que ce film ait connu plusieurs versions et que certaines séquences soient présentes ici, absentes là : après tout, n’est-ce pas normal pour un film dont le propos est d’essayer de montrer la multiplicité invraisemblable des existences et comment le battement d’ailes d’un papillon, c’est-à-dire une modification infinitésimale de la réalité suffit à donner d’extraordinaires bouleversements de l’histoire que nous connaissons ? Nous savons bien, intuitivement, qu’il n’est pas indifférent, dans nos propres vies, que, à un moment donné, nous prenions la rue qui tourne à droite, la rue qui tourne à gauche, la rue qui va tout droit et que le choix que nous faisons – ou l’absence de choix – peut nous faire rencontrer des aventures bizarres… ou pas d’aventures du tout. Ce qui influera ) sur la suite de notre existence. (suite…)

Les damnés

mercredi, novembre 8th, 2023

Ploum-ploum tralala.

Si Les damnés avaient porté pour titre Le crépuscule des dieux, comme l’ambitionnait le prétentieux Luchino Visconti, n’auraient-il pas été encore plus boursouflés qu’il ne le sont ? Car, au milieu d’images souvent intéressantes, malgré la musique grandiloquente et complétement ratée de Maurice Jarre, grâce au jeu plutôt réussi de bons comédiens de second rang, Ingrid ThulinDirk BogardeHelmut Berger, le film tranche plutôt positivement sur la lourde filmographie du réalisateur. Et ceci même s’il ne s’abstrait pas (mais serait-ce possible ?) sur les lourdes obsessions d’un homme sûrement enfoui dans les angoisses et les délices de sa personnalité. Être porteur d’un des plus beaux et des plus anciens noms de l’Europe civilisée, subir son homosexualité à une époque où cette disposition n’était qu’à peine admise, ressentir une fascination malsaine pour les engloutissements, les effondrements, les apocalypses, personnels et sociétaux, n’appelle évidemment pas l’esprit aux fariboles légères. (suite…)

Un vrai crime d’amour

jeudi, novembre 2nd, 2023

Film d’amour et d’anarchie.

Ce serait vraiment un film magnifique, du meilleur niveau du cinéma italien de la haute et merveilleuse époque, si le réalisateur n’avait pas chargé son film de lourds relents politiques et d’une fin abominablement mélodramatique. Écrivant cela, je ne dis pas que les catastrophiques conditions de travail dans les usines du Capital, qui martyrisent et tuent les travailleurs ne doivent pas être dénoncées avec férocité : on a sacrifié des millions de gens qui ont souffert jusqu’à la mort le mépris total qu’avaient des salopards indifférents pour des gens de leur nature ; je ne dis pas non plus que l’intensité accablante du mélodrame est dépourvue de toute qualité ; bien loin de là : il n’y aurait pas eu, sans cela, Les Misérables et tant d’autres chefs-d’œuvre. (suite…)

42ème rue

mardi, octobre 31st, 2023

Prélude à la gloire.

Quelle déception avec ce film présenté un peu partout comme ayant une place à part dans l’histoire du cinéma, parce qu’il a lancé la carrière de Busby Berkeley et inauguré ce genre rebattu de la préparation compliquée d’une revue musicale ! C’est vrai, ce genre de scénario a fait florès : Place au rythme de Busby Berkeley précisément en 1937, La reine de Broadway de Charles Vidor en 1944, Tous en scène de Vincente Minnelli en 1953… tant d’autres jusqu’à Que le spectacle commence de Bob Fosse en 1979… D’ailleurs, même en France il y a le délicieux Ah ! les belles bacchantes de Jean Loubignac en 1954. C’est dire ! (suite…)

Alfred le Grand, vainqueur des Vikings

dimanche, octobre 29th, 2023

Assez lent, plutôt lourd.

Attiré par l’euphonie et la signification du titre intégral, Alfred le Grand, vainqueur des Vikings, j’ai regardé sans déplaisir le film de Clive Donner tout en m’ennuyant un peu de la répétitivité des séquences et de l’absence de tout regard historique autre que superficiel, hollywoodien en d’autres termes. Il est pourtant certain que la vision jetée sur cette période de l’histoire européenne qui est en train de s’engluer un peu a le mérite de l’originalité. Il n’y avait guère eu, jusque-là, que les superbes Vikings de Richard Fleischer en 1958, avec Kirk Douglas et Tony Curtis qui avaient mis en scène ces invasions barbares survenant au moment d’un réchauffement climatique (déjà ! Nil novi sub sole !) et de la fin de la Renaissance carolingienne. (suite…)

Les Cent et une nuits

jeudi, octobre 19th, 2023
On n’en gardera rien !

J’ai beaucoup écrit, ici et ailleurs, sur le cinéma d’Agnès Varda. J’ai écrit mon enthousiasme pour Cléo de 5 à 7, pour Sans toit ni loi, mon plaisir de regarder Le bonheurDaguerréotypesLes glaneurs et la glaneuse, mon intérêt pour Les plages d’AgnèsVisages, villages. Sans pour autant dissimuler mes réticences et même mon rejet pour les films militants gauchistes et écologistes comme Lions love ou par des filmages aussi complaisants que Jane B. par Agnès V. La dame de la rue Daguerre avait des idées farfelues, dont je suis à l’antipode, mais elle avait un sacré talent et j’ai aimé et aimerai toujours sa capacité à entrer dans la nature du monde et à faire vivre des personnages.

(suite…)