Le fugitif

Moins bien que le feuilleton…

J’ai le souvenir fugace d’un feuilleton diffusé au milieu des années Soixante où un courageux médecin injustement accusé passait un nombre incalculable d’épisodes à mettre la main (si j’ose dire) sur le bandit manchot qui avait tué sa femme. C’était si long que je ne me souviens pas si, à la fin il s’en sortait, mais c’est très vraisemblable. En tout cas ce n’était pas ennuyeux et l’ingéniosité de chacune des petites histoires mises en scène était de qualité : à chaque fois, le docteur Kimble était à deux doigts (!!) de confondre l’assassin qui s’en sortait miraculeusement…

Le film de l’inconnu Andrew Davis est d’une plus grande banalité mais c’est un bon film d’action, rondement mené. Il devient malheureusement de plus en plus compliqué et de plus en plus prévisible (le paradoxe n’est qu’apparent). Une fois admis le caractère rocambolesque des péripéties et l’invraisemblance des aventures, ce qui fait largement partie du plaisir, on marche assez bien. Que Kimble – chirurgien reconnu – puisse se sortir avec un talent fou d’un énorme accident entre son fourgon cellulaire et un train de marchandises, qu’il puisse survivre sans dégât à un saut dans une chute d’eau auprès duquel celui de Patte de jaguar, dans Apocalypto fait mine d’un petit plouf dans une piscine, qu’il se batte comme James Bond contre les policiers, les malfrats, son ancien ami et confrère, c’est la loi du genre…

Mais je suis plus restrictif sur certaines incohérences : les prémisses du film sont un peu biaisées : l’acharnement de la police à coincer le docteur Kimble est mal compréhensible. Il n’a pas pris de position anarchiste contre l’État de l’Illinois, il n’est pas un ennemi des Lois, ni un malfaiteur possiblement récidiviste et toujours suspect, mais un type installé, fortuné, serein. Dès lors, sa mise en accusation, et l’agressivité de la police de Chicago envers lui est bizarre. On peut d’ailleurs imaginer que si un type supérieurement intelligent avait décidé de tuer sa femme de façon préméditée, il n’aurait pas multiplié les indices accablants… Et puis cette folle traque de la police pour un meurtrier relativement banal ! Quel luxe de moyens ! Chiens policiers, hélicoptères, équipes de dragage, mobilisation générale pour bien peu de choses…

On aurait pu insister davantage sur l’étrange relation qui se noue entre Kimble (Harrison Ford) et le policier Gerard (Tommy Lee Jones) qui, à certains instants, fait songer au lien qui se noue entre Jean Valjean et Javert des Misérables, de fascination mutuelle. Mais c’est peut-être quelque chose d’un peu complexe pour un blockbuster.

Toujours est-il que le thème de l’innocent qui veut démontrer sa blancheur a eu quelque succès : sous le même titre de Fugitif, je note qu’un certain Robert Bibal a réalisé en 1947, avec le funeste René Dary en vedette un film dont les thèmes sont à peu près identiques….

Production banale, film attrayant…

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