Mission : impossible 2

Je te tiens, tu me tiens par la barbichette…

Une fois qu’on a compris, dès les premières séquences du film, que toute la smala mise en scène maîtrise comme personne la faculté de dissimuler son apparence sous un masque en latex et de se faire passer ainsi, à l’envi et à loisir, pour un autre personnage que celui que l’on est, on sait que le film sera long et ennuyeux. Long, assurément, il l’est : un peu plus de deux heures ; quand on pense que les petits bijoux de la série originelle télévisée, de Bruce Geller n’avaient que le format élémentaire et réglementaire de 48 minutes, denses, nerveuses, complexes mais toujours claires et qu’on arrive désormais à de si lourds pathos ! On voit combien la marchandisation du spectacle a abêti le monde du spectacle.

J’avais regardé sans grand enthousiasme le premier film de la nouvelle mouture, le Mission impossible de Brian De Palma, bien réducteur mais qui avait quelque agrément. Je m’aperçois avec effarement que j’ai regardé, il n’y a pas un an, le troisième volet, Mission impossible 3 de Jeffrey Abrams, qui m’avait si peu paru valoir tripette que je n’en conservais pas le moindre souvenir, jusqu’à ce que je relise ce que j’avais écrit dessus. Et je constate que depuis lors, la production internationale, ayant trouvé une sorte de veau gras inépuisable a donné aux spectateurs avides trois suites, Protocole fantômeRogue nation et Fallout. Et que – pire encore – deux autres films sont prévus pour 2021 et 2022. Les mêmes folies redondantes que pour la série des James Bond qui n’ont, eux non plus, rien à voir avec leur matrice originelle.

J’ai écrit que Mission impossible 2 était long ; mais il est également ennuyeux, emberlificoté, dénué de toute surprise, sauf à croire que les coups de théâtre les plus téléphonés, ceux qu’on voit venir du fin fond de l’horizon constituent des surprises. Et d’ailleurs, aussi, de croire que l’effet de surprise est l‘ultima ratio et la justification de tout récit, ce qui n’est pas vrai (sans quoi on ne prendrait pas autant de plaisir à revoir dix fois L’assassin habite au 21 ou Psychose).

On trouve dans ce fourbi tout ce qu’on est malheureusement habitué à trouver dans les superproductions internationales : une façon de filmer hystérique et sans raison virevoltante, des poursuites en voiture qui n’abusent plus personne (et font beaucoup moins d’effet que celle de Bullitt au demeurant), un érotisme lisse à base de jolies filles hiératiques, glaçantes et interchangeables, des dialogues minimalistes qui se veulent le comble de la profondeur (et le sont peut-être, au demeurant, pour une bonne partie de la population désormais décérébrée).

Puis on introduit un risque majeur pour la planète, un virus foudroyant, nommé La chimère ; comme on fait mine de respecter son public et de le tirer vers les plus hauts empyrées, on lui fait miroiter que le contrepoison s’appelle Bellérophon, le dompteur de Pégase qui, dans la mythologie grecque, dompte et exécute en effet le monstre. On se doute après ça que la racaille de banlieue va se précipiter à la sortie de la salle sur les livres de Victor Bérard et de Pierre Grimal.

Bon là, je suis de mauvaise composition, j’en conviens. Mais pour rester dans la mauvaise foi, je note que le concepteur du virus Rade Šerbedžija, (qui fut l’ambigu Millich de Eyes wide shut) porte le nom étrangement slave de Vladimir Nekhorvich, ce qui me paraît bien sentir un peu beaucoup le slave ; l‘Empire du Bien désigne assez clairement la contrée d’où vient le Mal. Passons.

On a bien du mal à sortir de cette foutraquerie quoi que ce soit de positif : disons alors que le minois pointu de Thandie Newton qui est la vedette féminine du film ne manque pas de poivre et qu’elle interprète une chèvre tout à fait acceptable…

 

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