Le frisson des vampires

février 19th, 2024

Peu de frissons, beaucoup de vampires.

Passionné de cinéma depuis l’enfance, assistant réalisateur de Luis Buñuel (paraît-il), concepteur de quelques courts-métrages, Jean Rollin a saisi en 1968 qu’il pouvait trouver le succès en se posant au confluent de deux tendances lourdes. Deux tendances qui de façon singulière et sans rapport direct l’une avec l’autre avaient mis ou allaient mettre pour un long temps la main sur l’imaginaire du monde. C’était d’abord la vogue des films de vampires, relancée dix ans auparavant par la Hammer avec l’indétrônable Cauchemar de Dracula qui faisait revivre les solides recettes horrifiques des États-Unis de la Grande crise. Puis – ce qui allait devenir un déferlement – la libération sexuelle et davantage encore, à ce moment précis la fin de la pudibonderie qui a permis que la nudité intégrale fût exposée à l’écran. La pornographie ne s’est établie que quelques années plus tard, avec une telle puissance qu’il a fallu, fin 1975, imposer le classement X, fiscalement pénalisant. Read the rest of this entry »

Anatomie d’une chute

février 13th, 2024

Mon Dieu quel bonheur d’avoir un mari bricoleur !

D’abord, le titre que je donne à cet avis ne peut être saisi que par qui a vu le film. Puis j’ai lu beaucoup et beaucoup d’articles dithyrambiques sur Anatomie d’une chute, film couronné par la Palme d’Or de Cannes en 2023. Au fait vous souvenez-vous des Palmes de 1965, 1973, 1992, 2004, 2007, 2017 et même 2022 ? Non, n’est-ce pas ? Reportez vous dans Wikipédia sur ces dates et ces références : vous verrez que vous n’aurez pas plus de souvenirs là-dessus que sur les Prix Goncourt 1962, 1986, 1991, 1996, 2000, 2008, 2017… Voilà qui permet de relativiser la nature de ces récompenses, qui n’ont aucune espèce d’importance trente ans après leur attribution. Rien à voir à ce qui demeure en mémoire. Read the rest of this entry »

Les bonnes causes

février 12th, 2024

Les diaboliques.

Ah oui, quelle merveille que ce film des plus belles années du cinéma français, plein d’intrigues compliquées, de dialogues spirituels et intelligents (du Jeanson ! C’est dire) et de numéros d’acteurs tous plus remarquables les uns que les autres ! Je n’évoque pas même, à ce moment, les vedettes du premier rang mais tous ceux qui, pour quelques secondes quelquefois, s’ancrent dans l’œil du spectateur et donnent de la profondeur, de l’épaisseur, de la substance au film ! Qu’est-ce que nous avons perdu avec l’indifférence des rogues petits seigneurs subventionnés d’aujourd’hui pour ces modestes et indispensables serviteurs du cinéma, qui donnaient tant de plaisir ! Jacques Monod, le Procureur, Hubert Deschamps, le médecin, Mony Dalmès la tenancière des studios coquins et même Bernard Musson le majordome compassé… Sans oublier la rapide pige faite par José Luis de Villalonga dans le rôle du très rapidement mort… Read the rest of this entry »

Susana la perverse

février 10th, 2024

Vipère dans la maison.

Dans la cruelle, violente, méchante période mexicaine de Luis BuñuelSusana la perverse intervient juste après le grand drame pesant Los Olvidados qui se penche sur les horreurs de la ville métropole sauvage. Le film suivant s’ancre dans la campagne, précisément dans une hacienda qu’on peut juger assez prospère, opulente, bien tenue, pleine de servantes déférentes et d’ouvriers agricoles (peines) qui obéissent au doigt et à l’œil aux ordres du propriétaire, grand seigneur rural que tous respectent. Read the rest of this entry »

Quartier des cerises

février 7th, 2024
Terra incognita.   

 

Alors que depuis les désastreux accords Blum/Byrnes du 28 mai 1946, notre France est inondée par le cinéma des États-Unis qui ne se sont pas contentés de nous envoyer des chefs-d’œuvre mais nous ont refilé leur tout-venant, nous avons bien peu reçu de films soviétiques pendant la même période. Il est vrai qu’au-delà des cercles communistes militants de France-U.R.S.S., nous nourrissions une certaine méfiance pour un cinéma jugé idéologique (comme si celui de l’Oncle Sam ne l’était pas !). Certes les cinéphiles connaissaient les noms de Poudovkine ou de l’admirable Eisenstein ; certes franchissaient de temps en temps les frontières les merveilles de Kalatozov, de Bondartchouk, d’Andrei Tarkovsky, de Paradjanov. Plus tard les films de Pavel Lounguine, d’Andrey Konchalovskiy et bien sûr de l’impeccable Nikita Mikhalkov.

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L’homme au complet blanc

février 2nd, 2024

L’obsolescence programmée.

Il y a eu un moment délicieux dans l’histoire d’Angleterre. À la fin de leur domination impériale traduite en 1947 par l’indépendance de l’Inde, grand machin inutile et consternant, notre voisine d’Outre-Manche qui pensait avoir gagné la Guerre (comme nous l’avions pensé en 1919) a produit une kyrielle de films intéressants. Des films où elle s’affirmait indépendante de ses voisins et enfançons étasuniens, où elle apportait du piment, de la verve, de l’imagination au cinéma. Tout n’était pas de haute qualité, mais on pouvait s’étonner, même se réjouir de cette typique excentricité britannique qui n’a pas de correspondance de l’autre côté du Channel. Read the rest of this entry »

Le criminel

janvier 28th, 2024

Et on tuera tous les affreux…

D’après ce que je lis, le scénario du Criminel a été nommé aux Oscars de 1947. Voilà qui prouve, s’il en était besoin, que ces célébrations, où la profession se retrouve et s’autocongratule, n’ont absolument aucune autre importance que médiatique. Qu’elles ne sont, en tout cas, jamais gage de qualité ou de profondeur. Car c’est assurément le scénario qui plombe gravement le film de commande d’Orson Welles et le ravale au rang d’une production plutôt banale. Production à peine sauvée par la qualité de la distribution – Welles en premier lieu, mais aussi Edward G. Robinson et la très jolie Loretta Young -. Read the rest of this entry »

Là-haut

janvier 26th, 2024

Le magasin des rêves.

Comme nos petits-enfants nous avaient été confiés hier soir nous avons regardé Là-haut. Plus spontanément et sans le genre de contraintes lorsqu’un petit garçon de 4 ans (presque et demi) et une plus grande fille, se réfugient tendrement dans vos bras, j’aurais assurément regardé autre chose. Un truc un peu sanglant, ou un peu décalé, ou un peu glauque : mes goûts habituels, quoi… Mais là, j’étais bien contraint par la configuration familiale de me plonger dans un dessin animé. Et lorsque j’écris dessin animé, je me réfère à ceux que j’ai vus, émerveillé, lorsque j’avais l’âge de mes petits : Blanche NeigeCendrillonLa belle au bois dormant. Read the rest of this entry »

Dahmer le cannibale

janvier 22nd, 2024

Glauque fouillis.

Les maniaques, les assassins compulsifs, les pervers, les cinglés sont légion, certainement depuis le début de l’Humanité. Il existe d’ailleurs sûrement un ouvrage qui dresse la nomenclature de ces noms fous, depuis Gilles de Rais, depuis Vlad Drakul, depuis Erszebet Bathory, depuis des tas d’autres.

Mais il faut aussi remarquer que les États-Unis (étendue du territoire ? pesanteur du protestantisme rigoriste ?) réunissent une collection assez remarquable de monstres spectaculaires. En tout cas beaucoup des serial killers du 20ème siècle en sont issus. Read the rest of this entry »

Seule contre la Mafia

janvier 20th, 2024

Les tentacules de La Piovra.

On est à peine étonné que Seule contre la mafia soit inspiré d’une histoire vraie : le film, d’ailleurs, a presque un côté documentaire et expose de façon très claire le processus de paralysie infligé par la Mafia à toute une population. Les gens sont à la fois rassurés par l’existence d’un ordre – injuste mais gage de stabilité – et terrifiés par la menace insidieuse ou, s’il le faut, plus explicite que la Pieuvre fait peser sur eux. Contre-société parfaitement organisée qui ne s’embarrasse pas de scrupules et – surtout ! – de formalités. L’allégeance au capo, au patron reconnu vaut protection absolue, faveurs diverses, passe-droits et avantages. Terrible, non ? Être du bon côté… ou n’être rien. Read the rest of this entry »