Dernier domicile connu

dernier_domicile_connu_1970

Assez faible

Je ne rejoins pas la cohorte des admirateurs,  et, sans ensevelir complètement Dernier domicile connu dans la liste (vaste et profonde !) de mes déceptions, je suis bien conduit à avouer – à proclamer, même ! – que j’ai trouvé ça bien faible et que mon 3 est trop complaisant, 2,5 me convenant mieux.

Sans doute suis-je ainsi dépité parce que je viens de découvrir le film, alors que mes honorables camarades ont possiblement conservé en mémoire leurs souvenirs de 1970, l’épaisseur des personnages joués par Lino Ventura et l’acide séduction de Marlène Jobert. Mais le film de Giovanni pour qui le regarde aujourd’hui pour la première fois n’a pas le charme délicieux des œuvres en noir et blanc d’avant-guerre et des années Cinquante et présente donc, au contraire des désuétudes enchantées, un caractère tout à fait démodé et bien souvent ridicule.

Un truisme essentiel : 1970 – date du tournage – c’est précisément deux ans après Mai 68 ; c’est une époque de contestation généralisée de l’État, des hiérarchies, des Pouvoirs : le bon ton consiste à opposer la force et l’honnêteté de l’individu isolé, à la stature marmoréenne, aux calembredaines, magouillages et ignominies de tout ce qui détient une parcelle d’autorité. En gros, et en l’espèce, le discours dominant est qu’il peut y avoir quelques flics purs, mais que toute l’institution policière est vérolée, pourrie de haut en bas, sensible à toutes les influences des gros qui, structurellement, n’ont que mépris pour les humbles. Je ne dis pas qu’on ne peut pas soutenir une thèse pareille, je dis que ça se passe d’une façon un peu plus subtile que ça.

Je doute qu’on me contestera que Giovanni travaille avec des sabots d’autant plus gros que, s’il est un conteur d’histoires efficace, ce n’est pas un réalisateur virtuose et il manque souvent de discernement, voire de bon goût : l’évocation de la petite fille malade (Bianca Saury) de Martin (Philippe March), toute pastellisée et embrumée, est grotesque, comme est grotesque le premier plan sur Marceau Léonetti (Lino Ventura), totalement inoccupé dans le Commissariat de quartier, ou la douche prise tout habillé par le même Marceau après qu’il a été passé à tabac. Et que dire des « captures » d’obsédés sexuels effectuées par Marceau dans les cinémas, avec le concours de Jeanne (Marlène Jobert), qui sont à hurler de rire…? Jeanne qui, prétendument petit flic de base (enquêteur de police) vit dans un très agréable appartement, presque luxueux…

D’ailleurs, à dire le vrai, ni les dialogues (de Giovanni lui-même ?), ni la musique (du pourtant toujours excellent François de Roubaix) n’échappent au médiocre…

Qu’est-ce qui reste, alors ? Une histoire astucieuse, et même assez brillamment construite, le jeu de Ventura et de Marlène Jobert, moins piaillante que d’habitude, et surtout celui de Michel Constantin, aussi sobre et épatant que dans Le Trou.

C’est assez mince…

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