Le convoyeur

Le convoyeur afficheNe le dis à personne…

À considérer le succès critique du Convoyeur, il y avait de quoi se dire qu’on allait passer une honorable soirée. Il est vrai que le réalisateur, Nicolas Boukhrief, était, à l’époque du tournage (et est peut-être demeuré) un manitou de Canal+, dont on connaît le rôle financier prépondérant dans le cinéma français ; on peut imaginer que le copinage n’est pas pour rien dans le concert de louanges entonné lors de la sortie du film, concert qui n’a pas beaucoup été écouté par le public, au demeurant…

Sans doute la plongée à visée presque documentaire dans le monde peu exploré des transporteurs de fonds était-elle intéressante.

le-convoyeurRéunion hétéroclite de types venus d’un peu partout, aux histoires personnelles très variées, aux parcours singuliers, souvent surprenants, quelquefois inquiétants… défilé d’archétypes, très (et trop) caractérisés, l’armurier La belette (Julien Boisselier), le syndicaliste obsessionnel Butagaz (Gilles Gaston-Dreyfus), le vieux machin déprimé revenu de tout, La Momie (Philippe Laudenbach), la garçonne à la vie libre (Claude Perron), le baroudeur, sans doute ancien mercenaire de Bob Denard (François Berléand) , le bon camarade beau gosse, sympathique et rieur (Jean Dujardin). J’en oublie.

D’autant que tous ces personnages sont si superficiellement dessinés qu’on ne peut s’attacher à aucun et que leurs parcours entrecroisés semblent absolument artificiels alors que leur réunion est paradoxalement de l’ordre du vraisemblable et qu’il n’est pas impossible que Boukhrief se soit sérieusement documenté auprès d’une entreprise de convoyage réelle.18372368.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxCela posé, la partie documentaire épuisée, s’impose la lourdeur pesante et emberlificotée du récit. Celui-ci est écartelé entre deux ou trois fils.

D’abord, pour faire un peu dans le social, le rachat de l’entreprise par une entreprise plus importante et donc, à court terme, la perspective du licenciement de plusieurs employés.

Puis une assez banale histoire policière de duplicité : qui, parmi les convoyeurs, est le pourri qui renseigne les braqueurs, qui ont déjà assassiné, depuis quelques mois, trois ou quatre pauvres agents de sécurité ? Naturellement, c’est celui qu’on s’attendait le moins à voir dans ce rôle.

18372367.jpg-r_1280_720-f_jpg-q_x-xxyxxEnfin un mauvais mélodrame qui repose sur les épaules d’Alexandre (Albert Dupontel). Le scénario voudrait bien jeter plein de mystères sur les raisons de l’arrivée du quidam (qui, soit dit en passant, s’est fait embaucher avec une surprenante et radieuse facilité) dans la troupe. Est-il taupe de la société acheteuse, placé là pour faire le tri entre bons et mauvais éléments ? Est-il policier ? Bandit ? Simple chômeur ? Il me semble que l’évidence survient bien trop rapidement qu’il porte une lourde vengeance, qu’il a des comptes affreux à régler, des souvenirs sanglants qui se bousculent et tout le tremblement. (En fait je crois que c’est cela qu’il fallait comprendre, mais je n’en suis plus si certain que ça finalement, le film m’ayant souvent fait bâiller d’ennui).

Le_ConvoyeurComme dans tout ce genre de films à faux suspens surgissent graduellement des flashbacks qui peu à peu explicitent les bizarreries du scénario et les incongruités laissées en plan. La résolution des dernières énigmes est, comme souvent, brutale et bâclée dans une grande séquence violente qui doit avoir pour justification de saouler le spectateur et de lui faire oublier l’indigence de l’histoire.Notons que la manie du son direct est particulièrement affichée, ce qui induit qu’on comprend à peine la moitié des dialogues. Ça ne doit pas avoir beaucoup d’importance puisque ce que j’ai perçu de la moitié entendue ne me laisse pas supposer que la moitié inaudible valait davantage. Mais on peut dire que la qualité des acteurs est plutôt satisfaisante, rare bon point du film…

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